Bulletin OfficielDélégation interministérielle au R.M.I.

Circulaire DIRMI n° 97-834 du 31 décembre 1997 relative au revenu
minimum d'insertion : dynamisation des politiques d'insertion

AS 4 47
254

NOR : MESA9730694C

(Texte non paru au Journal officiel)

La ministre de l'emploi et de la solidarité à Madame et Messieurs les préfets de région (pour information) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (pour attribution) La prévention et la lutte contre les exclusions sont une priorité essentielle de l'action du Gouvernement qui s'est déjà traduite par un certain nombre de décisions importantes dans le domaine économique et social.
Un vaste programme gouvernemental d'action sur trois ans est en cours de préparation. Il comprendra notamment une loi d'orientation qui sera discutée par le Parlement avant la fin du premier semestre 1998.
Le RMI, dernier filet de la protection sociale et dispositif majeur de la lutte contre les exclusions, touche actuellement plus de trois pour cent de nos concitoyens et son volet insertion est généralement considéré comme insuffisant en dépit du travail considérable accompli par les multiples acteurs locaux dont les travailleurs sociaux, qui ont besoin qu'un nouvel élan soit donné à cette politique.
Aussi, sans attendre le vote de la loi, il importe que la dynamique d'insertion du RMI soit dès maintenant activement relancée.
C'est pourquoi j'attache une importance particulière à ce que l'Etat exerce pleinement toutes ses responsabilités en matière d'impulsion et d'animation des politiques d'insertion, aux côtés des conseils généraux dans le cadre de ce dispositif placé sous une responsabilité conjointe.
Quatre objectifs qui ont fait l'objet d'une concertation avec l'association des présidents de conseils généraux (APCG) doivent être poursuivis :

De plus 20 % des départements de métropole (liste en annexe n° 1), regroupant 60 % des bénéficiaires, connaissent une croissance des effectifs supérieure à la moyenne et corrélativement des résultats moindres en matière d'insertion. Aussi je demande aux préfets de ces départements, ainsi qu'à ceux des départements d'outre-mer, un effort tout particulier qui devra se traduire, grâce à l'augmentation des sorties vers l'emploi, par une réduction en 1998 du taux de progression du nombre des bénéficiaires. Je souhaite que vous vous fixiez un objectif chiffré de sorties vers l'emploi et que vous m'en rendiez compte.
1° Assurer un taux d'accès satisfaisant des bénéficiaires du RMI dans les mesures pour l'emploi.
L'analyse des statistiques permet de constater que si les entrées restent à un niveau élevé, les sorties ont fortement progressé, notamment en ce qui concerne les sorties vers l'insertion professionnelle. Ceci confirme que les bénéficiaires du RMI sont avant tout des chômeurs non indemnisés, victimes de la précarisation du travail et très majoritairement aptes à retrouver un emploi, pour autant que des propositions leur en soient faites.
En 1996, 276 000 bénéficiaires du RMI ont trouvé un emploi ou sont entrés en formation, soit 5 % de plus qu'en 1995. Ce taux est cependant, pour la troisième année consécutive, légèrement inférieur au taux de croissance des bénéficiaires du RMI. Cette évolution est préoccupante.
Aussi, je vous demande de mobiliser le service public de l'emploi pour que le recentrage de l'accès aux dispositifs de type CES, CEC, CIE, SIFE sur les personnes les plus en difficulté se traduise par un accroissement significatif du nombre de ces mesures offertes aux bénéficiaires du RMI.
On constate par ailleurs encore de trop grandes disparités d'accès à ces mesures pour les bénéficiaires du RMI selon les départements, avec des taux de couverture* pouvant varier de 6 à 53 %, pour un taux moyen national de 21 % (* bénéficiaires du RMI entrés, en 1996, dans une mesure CES, CEC, CIE, SIFE sur l'ensemble des allocataires payés du RMI).
Je souhaite que ce taux moyen soit porté en 1998 au moins à 25 %. Chaque département doit contribuer à cette amélioration importante pour les bénéficiaires du RMI mais je demande aux préfets des départements qui se situent actuellement en deça de ce taux un effort particulièrement significatif pour l'atteindre ou s'en approcher au maximum.
2° Veiller à la prise en compte dans de bonnes conditions des bénéficiaires du RMI âgés de moins de 30 ans dans le dispositif « emploi-jeunes ».
Les perspectives ouvertes par la loi sur les « emplois jeunes » représentent une opportunité d'insertion durable pour les bénéficiaires du RMI et notamment pour ceux qui sont âgés de vingt-six à trente ans qui n'ont, pour la plupart, pas travaillé assez longtemps pour se voir ouvrir des droits à indemnisation.
Cependant l'accès d'un nombre significatif de jeunes bénéficiaires du RMI à ces emplois (bénéficiaires du RMI âgés de 26 à 30 ans ou âgés de moins de 26 ans et chargés de famille ou jeunes comptés à charge dans des foyers de bénéficiaires du RMI) nécessite une action volontariste de l'Etat en raison de la vive concurrence pour l'embauche sur ces postes.
Cette action devra être menée, notamment en direction des employeurs concernés, avec le Conseil général qui peut imputer sur les crédits d'insertion une aide à la création de ces emplois pour les bénéficiaires du RMI. Un effort particulier sera entrepris conjointement pour faciliter le développement d'une offre d'emplois correspondant au profil des bénéficiaires du RMI de faible qualification. Il importe en effet de promouvoir l'offre de services correspondant à ces publics et d'examiner les conditions de leur professionnalisation.
Par ailleurs, vous vous attacherez à mettre en place des procédures renforcées d'information et de mobilisation pour toucher le public RMI éligible à ce dispositif, sous l'impulsion d'une part de l'ANPE pour les bénéficiaires demandeurs d'emploi, d'autre part des chargés de mission RMI, avec l'appui du conseil général et en liaison avec les CLI et les cellules d'appui pour les autres bénéficiaires. Les CAF vous transmettront les listes de bénéficiaires de moins de 30 ans.
Je vous demande de déterminer localement un objectif ambitieux pour l'accès des bénéficiaires du RMI à ces emplois et d'en suivre attentivement la réalisation.
3° Assurer, avec les CLI, l'établissement d'un contrat d'insertion pour tous les bénéficiaires présents dans le dispositif depuis 1989.
Au 30 juin 1997, 77 156 personnes en métropole et 23 759 dans les DOM étaient bénéficiaires du RMI depuis 1989. Leur présence durable dans le dispositif pose un important problème et il convient de s'assurer que chacun d'eux a bien bénéficié de toute l'aide à l'insertion qu'il est en droit d'attendre. Par ailleurs, une meilleure connaissance de cette population est indispensable pour se donner les moyens de son insertion.
Je vous demande de vous rapprocher là aussi du président du conseil général pour mobiliser sur cet objectif l'ensemble des services instructeurs, en vous appuyant sur les CLI. Il vous appartiendra de veiller à régler les éventuelles difficultés rencontrées par les services instructeurs.
Au cours des trois prochains mois, chaque personne concernée doit être rencontrée au moins une fois, pour faire un bilan personnalisé de sa situation et créer les conditions pour qu'elle bénéficie d'un contrat d'insertion véritablement adapté à sa situation.
Cette expérience devrait permettre de mettre au point une procédure de suivi régulier des bénéficiaires présents depuis plus de cinq ans dans le dispositif.
Vous transmettrez à la DIRMI une synthèse des informations recueillies sur le profil de ces personnes et leurs besoins d'insertion (voir annexe n° 2).
4° Engager dès maintenant la préparation de programmes départementaux d'insertion de qualité pour 1998.
Le programme départemental d'insertion défini par la loi du 1er décembre 1988 modifiée est l'instrument déterminant de l'organisation de la lutte contre les exclusions au niveau du département en tant qu'outil de coordination et de programmation des actions et moyens mis en oeuvre par l'Etat, le conseil général et leurs partenaires.
Cependant, ce programme n'est trop souvent qu'un cadre formel voire un simple catalogue de mesures faisant l'objet d'une faible concertation alors qu'il devrait établir un lien systématique entre l'analyse des besoins des populations, la stratégie d'intervention élaborée par les partenaires, les moyens qui lui sont affectés ainsi que l'évaluation des résultats obtenus.
Je vous demande, pour l'élaboration du prochain PDI qui, selon les termes de la loi, doit être adopté au plus tard fin mars, de proposer au président du conseil général d'arrêter en commun les instructions pour que ce document et ses modalités de préparation soient conformes aux dispositions de l'article 36 de la loi sur le RMI (voir annexe n° 3).
Vous veillerez tout particulièrement à ce qu'un véritable bilan de la mise en oeuvre du précédent programme soit effectué et à ce que des objectifs lisibles de progression soient définis notamment pour les politiques qui relèvent au premier chef de la compétence de l'Etat (qualité de la gestion de l'allocation, emploi, logement). Ce sont des points sur lesquels j'insiste pour que des avancées soient réalisées.
En matière de santé, la circulaire du 21 mars 1995 a instauré les plans départementaux d'accès aux soins. Même si leur visée est plus large quant aux publics concernés, ces plans peuvent très utilement constituer le volet santé des PDI, afin d'éviter de disperser le travail des services.
Vous vous attacherez à associer à cette préparation l'ensemble des partenaires concernés et notamment les présidents des commissions locales d'insertion, les maires des principales communes et les associations. Ce travail pourra être l'occasion de produire des contributions que vous me transmettrez sous le timbre de la DIRMI afin d'enrichir le projet de loi d'orientation.
Je vous indique par ailleurs que mes services et l'APCG vont mettre en place prochainement un groupe de travail permettant, sur la base d'échange d'expériences, d'inciter les acteurs locaux à mieux maîtriser les modalités d'évaluation des actions menées et la méthodologie d'élaboration du programme.
5° Renforcer l'engagement de l'ensemble des services de l'Etat dans la lutte contre les exclusions.
L'objectif de réinsertion des bénéficiaires du RMI ne sera à notre portée que pour autant que l'ensemble des services concernés de l'Etat au plan local intègreront cette politique comme une priorité de leur action quotidienne.
J'attire votre attention sur l'aide que peut vous apporter à cet égard la constitution d'un pôle de compétence fortement structuré voué à la lutte contre les exclusions comme la possibilité vous en est donnée par le décret du 1er juillet 1992 portant charte de déconcentration.

*
* *

Le succès de cette démarche, qui vise à améliorer significativement l'efficacité des politiques d'insertion dans la perspective du futur programme national de prévention et de lutte contre les exclusions, dépendra très largement de votre détermination, sur laquelle je sais pouvoir compter, à mobiliser et animer les services de l'Etat et à conduire, avec le président du conseil général, l'implication des partenaires locaux.

Martine Aubry
ANNEXE I


DÉPARTEMENT
POURCENTAGE
de bénéficiaires
du RMI entrés
dans une mesure
emploi en 1996
EFFECTIFS
du RMI au 6/97
59 Nord19 % 59 089
13 Bouches-du-Rhône15 % 56 491
75 Paris16 % 51 130
93 Seine-Saint-Denis 8 % 35 061
62 Pas-de-Calais19 % 30 329
34 Hérault20 % 26 482
76 Seine-Maritime18 % 24 466
33 Gironde15 % 24 204
69 Rhône20 % 23 376
31 Haute-Garonne20 % 22 046
94 Val-de-Marne 6 % 20 369
92 Hauts-de-Seine14 % 19 983
6 Alpes-Maritimes15 % 19 975
83 Var18 % 19 685
30 Gard24 % 17 412
44 Loire-Atlantique18 % 17 368
95 Val-d'Oise13 % 14 758
57 Moselle31 % 13 032
38 Isère26 % 12 316
91 Essonne14 % 12 258
Moyenne des 20 départements métropolitains possédant les effectifs RMI les plus importants17 %519 830
Métropole21 %939 310

ANNEXE II
ANALYSE DES PROFILS ET BESOINS DES ALLOCATAIRES LES PLUS ANCIENS

L'établissement d'un contrat d'insertion pour tous les bénéficiaires du RMI présents dans le dispositif depuis 1989 doit être l'occasion de mieux connaître le profil, le parcours et les besoins de cette population.
Pour recueillir ces informations, la solution la plus immédiate consiste à utiliser le bulletin statistique de suivi des bénéficiaires du RMI établi au moment du contrat (BSB-Contrat) issu du système statistique national des bénéficiaires du RMI ou tout autre système de suivi local ayant reçu l'accord de la CNIL. Vous pourrez éventuellement construire un questionnaire spécifique pour cette opération. Celui-ci devra être bâti en s'inspirant du questionnaire BSB-Contrat.
Si aucune déclaration préalable de traitement local de données sur les bénéficiaires du RMI n'a été faite auprès de la CNIL dans votre département, les BSB-Contrat ou les questionnaires mis en place pour l'opération devront être totalement anonymisés (les informations sur le numéro RMI et le numéro allocataire devront être notamment barrés).
Le traitement des données recueillies pourra être mené au niveau de la CLI ou du département, par les services de l'Etat, comme par ceux du conseil général. Là encore, vous pourrez vous appuyer sur les outils informatiques existants, ou réaliser un traitement ad hoc, soit de manière interne, soit par l'intermédiaire d'une société spécialisée dans les traitements statistiques ou informatiques.
L'objectif de l'étude est, à travers une meilleure connaissance des bénéficiaires les plus anciens et de leurs difficultés, de pouvoir mieux répondre aux besoins d'insertion de cette population.

ANNEXE III
EXTRAIT DE LA LOI N° 88-1088 RELATIVE AU RMI
Article 36

Le conseil départemental d'insertion élabore et adopte, avant le 31 mars, le programme départemental d'insertion de l'année en cours.
Avant le 31 décembre, le préfet et le président du conseil général transmettent au conseil départemental d'insertion, chacun en ce qui le concerne, les prévisions qu'ils ont établies pour l'insertion des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion au titre de l'année suivante.
Le programme qui s'appuie notamment sur les programmes locaux d'insertion élaborés par les commissions locales d'insertion définies à l'article 42-1 et toute autre information transmise par celles-ci :
1° Evalue les besoins à satisfaire, compte tenu des caractéristiques des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion ; l'évaluation portera notamment sur le domaine social, sur le domaine de la formation, sur l'accès à l'emploi, au logement, à la santé, aux transports, à la culture, sur la vie associative ;
2° Recense les actions d'insertion déjà prises en charge par l'Etat, les collectivités territoriales et les autres personnes morales de droit public ou privé ;
3° Evalue, le cas échéant, les moyens supplémentaires à mettre en oeuvre pour assurer l'insertion des bénéficiaires de l'allocation de revenu minimum d'insertion ;
4° Evalue également les besoins spécifiques de formation des personnels et bénévoles concernés ;
5° Définit les mesures nécessaires pour harmoniser l'ensemble des actions d'insertion conduites ou envisagées dans le département et pour élargir et diversifier les possibilités d'insertion compte tenu des contributions des différents partenaires.
Il recense en outre :
1° La répartition entre les différentes catégories d'actions des crédits que le département doit obligatoirement consacrer aux dépenses d'insertion des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion en application de l'article 38 ;
2° La répartition entre les différentes catégories d'actions des crédits affectés par l'Etat aux actions d'insertion menées dans le département en faveur des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion.
Le conseil départemental d'insertion peut élargir le champ du programme départemental d'insertion à l'ensemble de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion et à l'ensemble des actions en faveur de l'insertion, notamment en matière économique, sous réserve que les crédits obligatoires prévus à l'article 38 restent affectés aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion. Le conseil départemental peut proposer toutes études ou enquêtes sur les phénomènes spécifiques de pauvreté et de précarité dans le département.
Au cours d'une réunion tenue six mois au plus tard, après l'adoption du programme, le conseil départemental d'insertion en examine les conditions de mise en oeuvre et peut proposer des mesures d'adaptation susceptibles de le soutenir et de l'améliorer.
Le conseil est tenu informé de l'avancement du programme départemental d'insertion et de la conclusion et des conditions d'exécution des conventions visées à l'article 39. Le représentant de l'Etat et le président du conseil général lui soumettent un rapport annuel, y compris financier, au plus tard quinze jours avant l'adoption du programme annuel.