Bulletin Officiel n°98/26Direction générale de la santé
Sous-direction de la veille sanitaire
Bureau des risques des milieux
et de l'alimentation
DGS/VS 3

Circulaire DGS/VS 3/98 n° 98-333 du 11 juin 1998 relative aux recommandations du Conseil supérieur d'hygiène publique de France, section de l'alimentation et de la nutrition, sur la dioxine

SP 4 437
1659

NOR : MESP9830229C

(Texte non paru au Journal officiel)

Référence : circulaire DGS/SD 1 B/91 n° 55 du 30 août 1991 : diffusion du rapport du Conseil supérieur d'hygiène publique de France section de l'alimentation « polychlorodibenzodioxines (PCDD) et polychlorodibenzofurannes (PCDF) » mai 1991.

La ministre de l'emploi et de la solidarité à Mesdames et Messieurs les préfets de region (direction régionale des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (direction départementale des affaires sanitaires et sociales [pour exécution]) à l'attention des ingénieurs du génie sanitaire, à l'attention des médecins inspecteurs En mai 1991, le Conseil supérieur d'hygiène publique de France, section de l'alimentation, a élaboré un rapport sur les polychlorodibenzodioxines (PCDD) et polychlorodibenzofurannes (PCDF) qui vous a été transmis par la circulaire en date du 30 août 1991. Il propose une DJT (dose journalière tolérable) de 1 pg TEQ/kg/jour. J'attire votre attention sur le fait que cette DJT est calculée non seulement à partir des critères de cancérogénèse mais également à partir des données expérimentales obtenues chez l'animal relatives aux effets toxiques sur la reproduction, l'immunité et le système nerveux. Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France n'a pas procédé à une évaluation quantitative des décès par cancers imputables aux dioxines. Ce type d'évaluation quantitative s'appuie en effet sur un modèle mathématique linéaire sans seuil utilisé pour les substances génotoxiques, alors que les dioxines ne sont pas reconnues comme génotoxiques. C'est pour cette raison que l'OMS admet une dose journalière tolérable calculée à partir de la dose sans effet chez le rat, avec un facteur de sécurité de 1000 classiquement admis pour les cancérogènes.
Suite à l'examen des résultats du plan de surveillance de la contamination du lait par les dioxines de la direction générale de l'alimentation, la section de l'alimentation et de la nutrition a constaté que les doses ingérées se rapprochent des doses maximales recommandées. Dans son avis du 6 octobre 1997, elle a rappelé que la solution à long terme du problème de la contamination des aliments et des graisses humaines par la dioxine réside dans la réduction drastique des sources. A la demande du Secrétariat d'Etat à la Santé, la section a établi des propositions visant à la réduction des émissions de dioxines et au suivi de l'exposition humaine (avis du 17 mars 1998).
Je vous transmets ci-joint les avis du Conseil supérieur d'hygiène publique de France. Je vous demande de procéder à une présentation de ces documents aux membres du Conseil départemental d'hygiène et d'en assurer une large diffusion auprès des partenaires locaux.
Je souhaite que vous teniez compte des recommandations du Conseil, dans les avis que vous serez amené à formuler, en particulier, dans le cadre des plans d'élimination des déchets et dans le cadre des procédures d'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement.

Pour la ministre et par délégation :
Pour le directeur général de la santé :
Le sous-directeur de la veille sanitaire,
Docteur Y. Coquin
CONSEIL SUPÉRIEUR D'HYGIÈNE PUBLIQUE DE FRANCE
Section de l'alimentation et de la nutrition
Séance du 17 mars 1998
Recommandations sur la dioxine

Les données expérimentales obtenues chez l'animal montrent sans équivoque que les dioxines sont des agents cancérigènes, qui, de plus, et parfois à de faibles doses, provoquent des effets toxiques divers sur la reproduction, l'immunité et le système nerveux. Chez l'homme, les données épidémiologiques sont difficilement interprétables du fait notamment d'expositions complexes. Seul l'effet cancérigène de la 2, 3, 7, 8 TCDD a été confirmé (IARC 1997), les autres effets étant transitoires ou sujets à des interprétations peu conclusives.
Les sources d'émission sont multiples, variées, et incomplètement connues. D'après des données publiées en Europe, depuis la fin des années soixante-dix, l'amélioration des procédés industriels et l'abandon de certaines fabrications ont conduit à une diminution globale des émissions. Cependant cette évolution globale reste à être confirmée en France, et surtout n'exclut pas des situations locales particulières.
Dans ce contexte, le Conseil confirme les valeurs maximales tolérables proposées par le CSHPF en 1991 et confortées depuis par des résultats expérimentaux :

L'exposition journalière moyenne en France peut être estimée d'après le nombre limité d'éléments disponibles de 1 à 5 pg TEQ/kg. Cependant du fait de leur faible poids corporel certains enfants consommateurs de produits contaminés peuvent dépasser 10 pg TEQ/kg/j.
Dans d'autres pays européens, d'après les données disponibles, les niveaux d'exposition les plus élevés concernent les enfants nourris au lait humain qui peuvent ingérer des doses de 100 à 400 pg TEQ/kg/j.
Il s'agit donc d'une part de prendre des mesures visant à réduire le risque par une diminution des émissions et d'autre part de développer des études permettant une meilleure évaluation du risque en France.
Sous l'autorité du Conseil, est mise en place une structure de veille chargée, d'une part, de l'informer des résultats des travaux en cours sur l'exposition des populations ainsi que des recherches épidémiologiques et scientifiques, d'autre part de proposer des recommandations.
Dans l'état actuel des informations recueillies, le Conseil propose les recommandations suivantes :
Pour mieux apprécier le risque santé publique lié aux dioxines en France il s'agit :
1. D'obtenir des données sur les niveaux d'exposition de différents segments de la population ;
2. De mieux cerner les effets toxicologiques de ces composés chez l'homme. Ce dernier point concerne à la fois les études épidémiologiques et une meilleure extrapolation à l'homme des résultats obtenus sur différentes espèces animales modèles.
Pour atteindre ces objectifs, des actions devront être développées ou soutenues dans les domaines relevant de plusieurs organismes ou structures.
1. Propositions concernant les études de terrain :

2. Propositions concernant la recherche :

Le Conseil insiste sur la nécessité de soutenir ces recherches de façon à maintenir en France un niveau d'expertise comparable à celui d'autres pays européens.
3. Propositions concernant l'alimentation :
Le lait est à la fois un aliment de base et un indicateur de contamination de l'environnement. De ce fait des valeurs guides ont été proposées prioritairement :

Pour les autres aliments la section alimentation et nutrition est sollicitée pour faire des propositions sur l'établissement de valeurs guides.
4. Propositions concernant l'environnement :
Le cadre général de la réduction des sources a été fixé par un programme cadre de la Commission de la Communauté européenne en 1993, fixant comme objectif une diminution de 90 % des émissions de dioxines en 2005 par rapport à 1985. Des valeurs limites ont été fixées ou sont en cours de discussion pour un certain nombre d'activités. En France, une valeur limite de 0,1 ng/Nm3 a été fixée pour l'incinération des déchets industriels spéciaux en 1996, et pour l'incinération des ordures ménagères en 1997, pour les nouvelles installations.
En effet, l'incinération des ordures ménagères apparaît comme une source importante d'émission de dioxines et des propositions peuvent d'ores et déjà être formulées concernant les installations existantes :

Si, pour des raisons historiques, les risques liés aux incinérateurs sont relativement bien connus, il n'en est pas de même pour les autres techniques de traitement des déchets.
En conséquence le Conseil propose les recommandations suivantes :

Le traitement thermique des ordures ménagères n'étant pas la seule source de production de dioxines, il est nécessaire d'avoir une réflexion plus large sur les autres activités génératrices. Ceci entraîne les recommandations suivantes :

Cet avis ne peut être diffusé que dans sa totalité, sans suppression ni ajout.

Avis sur les résultats du plan de surveillance de la contamination du lait
par les dioxines 1994-1995 de la DGAL (dossier 970082)

La section alimentation et nutrition du CSHPF a pris acte des résultats de l'étude de la DGAL sur les teneurs en dioxines dans les laits de mélange de quatorze départements et dans les laits de producteurs situés à proximité de certains incinérateurs. Le but des analyses était double :

La section constate :

Pour mieux apprécier les conséquences de la présence de dioxines dans les aliments, la section doit disposer d'informations supplémentaires, en particulier :

La Section rappelle que la solution à long terme du problème de la contamination des aliments et des graisses humaines par la dioxine réside dans la réduction drastique des sources.
Le 6 octobre 1997, J.-F. Narbonne, rapporteur.