Bulletin Officiel n°98/34445-2

Circulaire du 17 août 1998 relative à la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie (mesures d'urgence concernant la circulation des véhicules)

SP 4 436
2212

NOR : EQUM9800082C

(Journal officiel du 18 août 1998)

Paris, le 17 août 1998.

Le ministre de l'intérieur, le ministre de l'équipement, des transports et du logement, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement et le secrétaire d'Etat à la santé à Mesdames et Messieurs les préfets de département, Monsieur le préfet de police de Paris.
1. Les épisodes de pollution que rencontrent périodiquement un certain nombre de grandes villes françaises nécessitent de mettre en oeuvre, dans le cadre de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie et des textes réglementaires y afférents, un ensemble de mesures appropriées. L'objet de la présente circulaire est de préciser le contenu et les modalités de ces mesures, en fonction de la gravité des épisodes de pollution, pour ce qui concerne la réglementation de la circulation routière.
Vos pouvoirs de police actuels vous habilitent à prendre certaines mesures d'urgence dès que vous le jugez nécessaire. Les mesures de restriction des activités devront porter sur des sources qui contribuent à l'élévation des concentrations du polluant concerné. Vous trouverez en annexe I (1) quelques indications relatives à l'origine des principales formes de pollutions atmosphériques.
La loi sur l'air en son article 12 vous habilite également à prendre des mesures de restriction de la circulation des véhicules lorsque les seuils d'alerte sont atteints ou risquent de l'être. Par contre, le renforcement de l'offre et de la fluidité de transports collectifs, les mesures tarifaires (stationnement, transports collectifs) restent de la compétence des autorités dont elles dépendent habituellement. La cohérence de ces actions est essentielle. C'est pourquoi :

2. L'objectif principal du dispositif à mettre en place est en effet de limiter l'importance globale des pics de pollution et d'éviter, autant que faire se peut, les alertes. Dans cet esprit, vous instituerez une procédure de riposte graduée, conformément à l'arrêté du 17 août 1998 des ministres chargés de la santé, de l'industrie, des transports et de l'environnement, relatif aux seuils de recommandation et aux conditions de déclenchement de la procédure d'alerte, que vous activerez dès qu'un des seuils de concentration des polluants visé par le décret n° 98-360 du 6 mai 1998 est atteint ou risque de l'être.
Cette procédure comprend deux niveaux réglementaires que vous compléterez par un niveau préalable de mise en vigilance des services :

L'objet des mesures de restriction des activités, et notamment de restriction de la circulation, est d'accélérer le retour à l'objectif de qualité. Elles doivent également préserver non seulement le bon fonctionnement des services de secours et sécurité, mais autant qu'il est possible les conditions de l'activité économique de l'agglomération. C'est dans cet esprit qu'il vous appartiendra d'arrêter la liste des dérogations, ainsi que de préciser les conditions de la circulation des poids lourds.
En outre, un guide technique, également joint à la présente circulaire (1), précise les enjeux, l'efficacité et les conséquences des mesures pouvant être prises. Certaines d'entre elles sont applicables à l'ensemble des agglomérations, d'autres au contraire n'ont d'intérêt que dans certaines configurations locales. Néanmoins, pour permettre une compréhension par l'ensemble des usagers, elles doivent être conçues selon un schéma identique en tous lieux où elles sont susceptibles d'être activées. C'est pourquoi le guide technique fixe les principes communs et les instruments nécessaires à leur mise en oeuvre. Il indique le dispositif technique d'évaluation et de suivi qui permettra d'enrichir l'expérience et le savoir-faire des autorités et services territoriaux concernés.
3. L'activation d'un plan de circulation d'urgence nécessite un délai pour mettre en place la logistique nécessaire à ces mesures et pour permettre aux médias d'informer les usagers, au plus tard à partir de 19 heures la veille du jour d'application des mesures. C'est pourquoi il est souhaitable que soient mis en place des moyens de prévision de la qualité de l'air, en collaboration avec les organismes de surveillance de la qualité de l'air et Météo-France. En tant que de besoin, vous demanderez au directeur régional de l'industrie, de la recherche et de l'environnement de faire accélérer les études sur ce sujet.
Les conditions de déclenchement des mesures du niveau d'information et de recommandation ainsi que du niveau d'alerte doivent être conformes à l'arrêté du 17 août 1998, le dépassement des seuils ou le risque de dépassement des seuils devant être apprécié par référence à la valeur horaire constatée pour l'évaluation de l'exposition de la population aux substances polluantes. Cette évaluation reposera sur des calculs tenant compte de l'ensemble des résultats des mesures sur stations fixes, disponibles sur la zone ou l'agglomération considérée, ainsi que des estimations par modélisation. Une pondération correspondant à la zone ou à l'agglomération considérée sera réalisée à partir des valeurs fournies par les capteurs dits de fond et celles des capteurs dits de proximité. Cette pondération, privilégiant les capteurs de fond, tiendra également compte des valeurs fournies par les capteurs de proximité, lorsque ceux-ci existent.
En l'attente d'outils d'évaluation et de prévision de cette pollution et de leur validation dans les villes concernées, ce dépassement devra, dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants, avoir été constaté à moins de trois heures d'intervalle sur au moins deux stations. De manière générale vous vous assurerez de la représentativité de ce dépassement sur l'ensemble de la zone concernée par les mesures que vous prendrez.
4. Vous attacherez aussi une importance particulière au dispositif d'information. Il est l'élément déterminant de l'efficacité des mesures proposées, notamment en termes de réduction du volume de la circulation routière. En outre, c'est sur la durée que pourra être obtenue une évolution significative des comportements et la dimension pédagogique est en conséquence un élément important des actions qui doivent être menées. Dans cet esprit, le dispositif d'information devra comporter deux volets :

Effectuée et entretenue tout au long de l'année, elle prendra la forme d'informations générales via les radios et télévisions, de serveurs Minitel et Internet, de documents distribués au public, de réunions publiques et de dossiers de presse destinés à être repris dans la presse écrite. Elle sera complétée par une information sur le bilan des mesures mises en oeuvre, pour contribuer à crédibiliser l'action à long terme ;

En cas d'activation des mesures du niveau d'information et de recommandation, il convient de recommander aux personnes sensibles d'éviter toute activité physique intense à l'extérieur. Des instructions doivent être données pour limiter les activités sportives, par exemple dans les établissements scolaires. Selon l'article 4 de la loi sur l'air, vous pouvez déléguer cette information aux organismes agréés de surveillance de la qualité de l'air.
En cas d'activation des mesures du niveau d'alerte, cette information doit être diffusée « immédiatement », conformément aux articles 4 et 12 de la loi sur l'air.
Compte tenu du caractère exceptionnel et urgent des mesures relevant du plan de circulation d'urgence, le nouvel article R. 44-1 du code de la route (décret n° 98-702 du 17 août 1998) précise qu'aucune signalisation réglementaire n'est obligatoire sur le terrain. Néanmoins, l'information sur les recommandations de réduction et les restrictions de la circulation en cas de pic de pollution doit être suffisamment diversifiée pour que le plus grand nombre possible d'usagers soient informés et puissent modifier leurs comportements. Elle doit comporter le dispositif minimal prévu par le nouvel article R. 53-2-1 du code de la route (décret n° 98-702 du 17 août 1998). Elle peut s'appuyer au-delà de ce dispositif sur les médias (radios, télévisions), sur des serveurs Minitel et Internet, sur des répondeurs téléphoniques, sur des communiqués de presse destinés à être repris dans la presse écrite, ainsi que sur l'affichage urbain (panneaux à messages variables) et sur une information en mairie. Elle sera accompagnée d'une information sur le terrain, aussi importante que possible.
Bien entendu, le public sera également informé de la levée des mesures au travers des mêmes moyens.
Par ailleurs, il convient de bien montrer que les phénomènes de pollution s'analysent aussi, voire surtout, dans la durée. Vous veillerez donc à ce que l'information donnée sur la pollution moyenne sur la journée, sur la semaine ou sur de plus longues périodes soit de même qualité et qu'elle ait le même impact que l'information donnée en cas de pic de pollution.
5. Nous sommes conscients que ces dispositions sont complexes et qu'elles nécessiteront donc une mise en oeuvre progressive. C'est pourquoi il sera nécessaire d'évaluer leur efficacité, éventuellement de procéder à des exercices préalables et d'assurer une large diffusion des connaissances acquises dans les agglomérations concernées. Vous mettrez en place un premier groupe d'actions simples que vous développerez ensuite en fonction des moyens disponibles et du retour d'expérience des premières activations.
Chaque mise en oeuvre d'un plan d'urgence fera l'objet d'un bilan technique détaillé en termes de qualité de l'air, de trafic automobile et d'impact sur les activités et l'économie, ainsi que d'une évaluation de l'impact réel des mesures sur le public.
Vous voudrez bien nous faire part dans cet esprit des enseignements et des expériences résultant des actions que vous conduirez, ainsi que des difficultés éventuelles que vous pourriez rencontrer dans la mise en oeuvre de la présente circulaire.

Le ministre de l'équipement,
des transports et du logement,
Jean-Claude Gayssot
Le ministre de l'intérieur,
Jean-Pierre Chevènement
La ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement,
Dominique Voynet
Le secrétaire d'Etat à la santé,
Bernard Kouchner

(1) Les annexes peuvent être consultées à la direction de la sécurité et de la circulation routières du ministère de l'équipement, des transports et du logement, La Grande Arche, 92055 La Défense Cedex.