Bulletin Officiel n°98/34Direction de la sécurité sociale
Division des affaires européennes
et internationales

Circulaire DSS/DAEI/98 n° 485 du 30 juillet 1998 relative au maintien au régime français de sécurité sociale des travailleurs salariés détachés et des travailleurs non salariés exerçant temporairement leur activité à l'étranger et au maintien au régime de sécurité sociale de leur pays habituel d'emploi des travailleurs salariés détachés en France et des travailleurs non salariés exerçant temporairement leur activité sur le territoire national

NOR : MESS9830326C

(Texte non paru au Journal officiel)

Références : règlements (CEE) n° 1408/71, notamment son titre II, et 574/72, notamment son titre III, code de la sécurité sociale, notamment les articles L. 761-1 à L. 761-6 et R. 761-1 à R. 761-6. Accords bilatéraux et multilatéraux signés par la France en matière de sécurité sociale. Arrêté du 22 mars 1978. Lettre ministérielle n° 12 du 11 mai 1989 relative à l'application de l'article 14 quater du règlement 1408-71 (activités salariées et non salariées exercées simultanément sur le territoire de plusieurs Etats) ; circulaire n° 86 du 24 novembre 1992 relative aux règles concernant la législation applicable aux travailleurs migrants (dans l'Union européenne).
Textes abrogés : circulaire n° 12 SS du 29 mars 1977 ; lettre ministérielle n° 1592 du 24 février 1985.

La ministre de l'emploi et de la solidarité à Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales, direction interrégionale de la sécurité sociale des Antilles-Guyane, direction départementale de la sécurité sociale de la Réunion) ; Madame le directeur du centre de sécurité sociale des travailleurs migrants ; Monsieur le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale ; Monsieur le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés ; Monsieur le directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles ; Monsieur le directeur de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines ; Messieurs les préfets (directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle [pour information])
Le transfert, effectif depuis le 1er janvier 1998, des directions régionales des affaires sanitaires et sociales au centre de sécurité sociale des travailleurs migrants (CSSTM) du traitement des demandes de détachement de longue durée dans l'Union européenne et l'Espace économique européen ainsi que des prolongations de détachement dans le cadre des accords bilatéraux, a fait l'objet de la circulaire n° 723 du 17 novembre 1997 qui a exposé les modalités pratiques de sa mise en oeuvre.
Ces instructions ne visaient qu'à assurer les conditions d'une reprise satisfaisante des dossiers par l'établissement en charge de cette nouvelle mission.
Les autorisations de détachement, au sens le plus large du terme, c'est-à-dire incluant les dispenses d'assujettissement à la législation française, sont désormais, selon les cas, traitées à 3 niveaux : par la caisse de rattachement en matière d'assurance maladie, au CSSTM et enfin, pour certains dossiers, au ministère de l'emploi et de la solidarité, direction de la sécurité sociale.
Il importe de préciser ces trois niveaux d'intervention et la répartition des responsabilités à laquelle ils correspondent.
Mais surtout, l'importance que revêt aujourd'hui, en particulier dans le cadre européen, le phénomène du détachement, sa diversité, son ambivalence au regard des intérêts financiers de nos régimes de sécurité sociale, et les risques de « dumping social » liés à certaines formes qu'il a prises dans la période récente, imposent la définition d'une politique et l'établissement d'un certain nombre de critères et de règles auxquels les services compétents doivent pouvoir se référer dans les procédures conduisant à une décision d'autorisation ou de refus.
Tel est l'objet principal des présentes instructions dont la partie finale est consacrée à l'examen de points particuliers touchant le bénéfice du droit aux prestations pour les travailleurs détachés et leur famille dans le pays de détachement et, d'une manière générale, hors du territoire national.

DÉFINITIONS ET RAPPEL DU CADRE JURIDIQUE

Dans le cadre de la sécurité sociale, on entend par détachement le fait de maintenir à son régime de protection sociale le salarié qui, pour un temps déterminé, va exercer son activité professionnelle sur le territoire d'un autre pays.
C'est l'employeur qui détache le salarié à l'étranger et c'est lui qui demande à l'institution à laquelle le salarié est affilié le maintien de cette affiliation.
Le code de la sécurité sociale prévoit le détachement dans ses articles L. 761-1 à L. 761-6. Il distingue deux cas :

Le détachement conventionnel et le détachement en application des règlements européens (art. L. 761-1)
La France a signé, hors Espace économique européen, des accords de sécurité sociale avec trente-six Etats ou province d'Etat (Québec) et deux de ses territoires d'outre-mer (autonomes en matière de protection sociale), cf. liste en annexe. Elle applique par ailleurs les dispositions communautaires en matière de sécurité sociale prévues par le règlement (CEE) n° 1408-71 aux 17 autres membres de l'EEE. Ces textes ont en commun un certain nombre de principes, parmi lesquels le rattachement à la législation de sécurité sociale du pays d'exercice de l'activité. Ce principe admet des exceptions dont celle du détachement.
Ainsi, le travailleur détaché :

Le détachement dans le cadre conventionnel et communautaire sera examiné sous son double aspect du maintien au régime français et du maintien au régime d'un Etat étranger, s'agissant des salariés occupés en France.
Le détachement dit « interne » (art. L. 761-2)
A la différence du précédent, le détachement « interne » résulte de la seule application de la loi française. Il ne produit donc aucun effet du point de vue de l'Etat étranger sur le territoire duquel le détaché exerce son activité. Cela a pour conséquence l'application, lorsqu'elles existent, des lois sociales du pays de détachement. Il y a alors double affiliation et doubles prélèvements sociaux correspondants.
La durée maximale du détachement en application de l'art. L. 761-2 est fixée à trois ans, renouvelable une fois.
Cette situation, il importe de le noter, est celle du travailleur détaché dans un pays non lié à la France par un accord de sécurité sociale, mais aussi celle du travailleur détaché dans un pays signataire d'un tel accord et parvenu au terme de la durée fixée par ce dernier. Le détachement interne prend ainsi, le cas échéant, le relais du détachement conventionnel pour la période restant à couvrir jusqu'au terme de la durée maximale du premier (six ans).
Cependant, le détachement interne ne s'applique pas dans le cadre des règlements communautaires. En effet, ces derniers comportent, outre la règle du rattachement au pays d'emploi, celle dite d' « unicité de la législation applicable ». A l'issue de la période du détachement « réglementaire », le salarié est donc obligatoirement soumis à la seule législation du pays d'exercice de l'activité (si les conditions prévues par cette législation sont remplies).
I. - LE DÉTACHEMENT DANS LE CADRE DES CONVENTIONS ET ACCORDS BILATERAUX (sauf indication contraire, il est traité ici du détachement vers l'étranger)
Les conventions et accords bilatéraux (on les désignera sous le terme générique d'accords) comportent des dispositions relatives au détachement qui ont pour but d'éviter que les salariés détachés temporairement par leur employeur sur le territoire de l'autre Etat n'y soient également soumis à la législation de sécurité sociale de ce dernier.

Champ d'application personnel

L'accord précise toujours le champ des personnes couvertes ou exclues par ses dispositions :
- quant à leur statut : les personnels diplomatiques et consulaires en sont toujours exclus, les fonctionnaires et les travailleurs non salariés le plus souvent (exceptions pour ces derniers : Etats-Unis, Canada, Québec et Suisse sous certaines conditions) ;
- quant à leur nationalité : ne sont visés par l'accord que les ressortissants français et ceux de l'autre Etat (auxquels s'ajoutent normalement les réfugiés et apatrides).
S'agissant toutefois du détachement, certains accords ou les mesures prises pour leur application prévoient d'en octroyer le bénéfice aux ressortissants d'Etats tiers occupés sur le territoire de l'une des deux Parties (accords avec le Canada, le Québec, les Etats-Unis, la Suède et la Suisse).

1.1. Durée (maximale) du détachement

Elle est fixée par l'accord et varie de six mois (Cameroun) à cinq ans (Etats-Unis). Une prolongation est souvent prévue, de durée inférieure ou égale à la période initiale - on aboutit ainsi à une durée totale de six ans dans les accords avec le Maroc, les Philippines et la Tunisie. Dans d'autres cas, une prolongation est possible « jusqu'à l'achèvement du travail ». Enfin, certains accords prévoient qu'une prolongation peut être accordée sans en fixer le terme.
La période « initiale » du détachement est considérée comme étant « de droit » - ce que l'accord peut indiquer expressément (Turquie) - dès lors que les conditions se trouvent remplies, c'est-à-dire :

Le salarié est normalement détaché pour effectuer un travail déterminé, dont le terme est fixé de façon plus ou moins précise. Toutefois, ces éléments, sauf exception, ne peuvent être facilement appréhendés. Aussi, il n'y a pas lieu de soumettre la demande de l'employeur à un examen particulier dans ce domaine.
D'une manière générale, l'intérêt pour un salarié de se voir maintenu au régime français ne saurait être a priori mis en doute.
La prolongation éventuelle, qui est toujours subordonnée à l'accord des autorités ou institutions - en général des deux Etats - désignées à cet effet dans l'accord (ou son arrangement administratif), doit, par contre, être l'occasion d'une demande de renseignements adressée à l'employeur, qui doit porter sur les motifs pour lesquels le salarié prolonge son séjour professionnel.
Sous réserve de la justification de la prolongation du travail, la durée de la prolongation du détachement sera fixée selon la durée prévue par l'accord et, en toute hypothèse, sans qu'il y ait lieu de la limiter expressément à la durée maximale fixée à l'article R. 761-1.
Les textes ne prévoyant pas de prolongations successives, au-delà d'une première période de prolongation, quelle qu'en ait été la durée, la situation du travailleur concerné peut, à l'issue de cette prolongation, être examinée dans le cadre des dispositions relatives aux dérogations exceptionnelles.
En cas de silence prolongé des autorités étrangères préalablement sollicitées pour une demande de prolongation, l'organisme français peut présumer cet accord et maintenir le détachement dans la limite d'un an suivant le terme du détachement initial. Cette mesure implique le maintien des prestations familiales servies en application du texte conventionnel et la possibilité d'obtenir le service des prestations de l'assurance maladie de la part de la caisse primaire française d'affiliation.
Au-delà de ce délai, il n'est pas possible de présumer acquise l'autorisation prévue et, de ce fait, le maintien au régime français ne pourrait relever que de la législation interne française et dans le seul cadre de l'article L. 761-2 avec toutes les conséquences en résultant en matière de droit aux prestations.

Renouvellement du détachement

Certains accords (F/Etats-Unis) prévoient un délai minimum entre deux détachements. Lorsque ce n'est pas le cas, il convient d'examiner avec attention les demandes rapprochées visant les mêmes salariés. Cette précaution ne vaut pas pour les missions professionnelles de courte durée que des salariés sont amenés à effectuer fréquemment en raison de la nature particulière de leurs tâches.
Nota : Lorsque le salarié a été détaché pour une période inférieure à la durée de la période initiale de détachement prévue par l'accord, il n'y a pas lieu de demander à l'autre Etat la prolongation du détachement. Cette procédure n'interviendra, le cas échéant, qu'au moment où la durée prévue par l'accord pour la période initiale sera sur le point d'être atteinte.

Les procédures

La demande de détachement est formulée par l'employeur auprès de la caisse primaire d'assurance maladie dans le ressort de laquelle est située l'entreprise. L'organisme remet au salarié le formulaire de détachement prévu par l'accord.
Les demandes de prolongation sont du ressort du Centre de sécurité sociale des travailleurs migrants. Le CSSTM reçoit des employeurs les demandes de prolongation du maintien au régime français, qu'il transmet pour accord aux autorités ou à l'organisme compétent de l'autre pays, ainsi que les demandes de prolongation du maintien au régime étranger que lui soumet l'autorité ou l'organisme de l'autre pays.
S'agissant du maintien à un régime étranger, et en particulier lorsque l'accord ne prévoit pas de disposition de coordination en matière de soins de santé, l'intérêt des salariés en cause doit amener au contraire à respecter strictement l'application des dispositions de l'accord sur le détachement. En tout état de cause, la durée totale du maintien au régime étranger ne peut jamais être supérieure à 6 ans.

1.2. Détachement dans le cadre de dérogations exceptionnelles

En dehors du détachement et de sa prolongation éventuelle, les travailleurs peuvent être maintenus à leur régime de sécurité sociale en application de mesures dérogatoires aux règles générales et particulières d'affiliation, dont tous les accords prévoient la possibilité (ex. art. 9 de l'accord franco-américain, art. 7 de la convention franco-turque). La disposition en cause permet soit d'accorder des détachements de longue durée, soit de régler des cas particuliers : à titre d'exemple celui des ministres du culte considérés comme travailleurs indépendants aux Etats-Unis, et de ce fait au sens de la convention, qu'une dérogation à la règle fixée dans l'accord permet de faire bénéficier d'un détachement (plus long) en qualité de salariés, ce qui correspond à leur véritable situation en France.

Les procédures

Ces dérogations, qui doivent demeurer exceptionnelles, sont gérées par le centre de sécurité sociale des travailleurs migrants.

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Nota : seul l'accord franco-américain prévoit le détachement des travailleurs non salariés. A signaler toutefois le maintien à leur régime de sécurité sociale des travailleurs non salariés exerçant temporairement sur le territoire de l'autre Partie, que les autorités françaises et québécoises sont convenues d'accorder au cas par cas.

II. - LE DÉTACHEMENT DANS LE CADRE
DES REGLEMENTS COMMUNAUTAIRES

Les règles d'assujettissement applicables aux travailleurs migrants, salariés et non salariés, qui font l'objet du titre II du règlement 1408/71, ont été rappelées et explicitées dans la circulaire citée en référence du 24 novembre 1992.
On examinera ici les dispositions visant la situation du détachement et son équivalent prévu en faveur des travailleurs non salariés.

2.1. Le détachement (travailleurs salariés : art. 14. 1)
Champ d'application personnel

Les ressortissants d'Etats tiers par rapport à l'E.E.E. ne sont pas couverts par le champ d'application personnel du règlement 1408/71 (sauf s'ils ont la qualité de réfugiés). La jurisprudence de la CJCE amène toutefois à nuancer cette restriction s'agissant du détachement.
Cette jurisprudence a en effet limité le droit pour les Etats d'appliquer des mesures nationales qui auraient pour effet de restreindre ou d'entraver l'exercice de la libre prestation de services. Selon la Cour, le droit communautaire s'oppose à ce qu'un Etat oblige un employeur établi dans un autre Etat membre et exécutant temporairement, par le moyen de ressortissants de pays tiers, des travaux dans le premier Etat à verser la part patronale des cotisations de sécurité sociale pour ces travailleurs alors que celui-ci est déjà redevable pour lesdits travailleurs et pour les mêmes périodes d'activité, de cotisations comparables en vertu de la législation de son Etat d'établissement (arrêt du 3.02.1981 - affaires 62 et 63/81 (Seco) ; dans un domaine voisin, avec des conséquences identiques : arrêt du 9.08.1994 C-43/93 Vander Elst)
On ne devra donc pas assujettir au régime français des salariés, non ressortissants communautaires ou d'un Etat de l'E.E.E., déjà affiliés dans l'Etat membre où est établie l'entreprise qui les occupe de façon régulière et habituelle et qui les a détachés en France dans le cadre d'une prestation de services.
De même, les entreprises françaises doivent être informées que leurs salariés ressortissants d'Etats tiers, détachés dans le cadre d'une prestation de services et maintenus au régime français en application de notre législation interne (art. L. 761-2 du code s.s.) sont normalement exemptés de cotisations dans l'autre Etat.

2.1.1. Le détachement « de droit »

L'article 14 paragraphe 1 fixe sous a) l'une des règles particulières (les termes figurent dans le titre de l'article) de détermination de la législation applicable aux travailleurs migrants : « la personne qui exerce une activité salariée sur le territoire d'un Etat membre au service d'une entreprise dont elle relève normalement et qui est détachée par cette entreprise sur le territoire d'un autre Etat membre afin d'y effectuer un travail pour le compte de celle-ci, demeure soumise à la législation du premier Etat membre, à condition que la durée prévisible de ce travail n'excède pas douze mois et qu'elle ne soit pas envoyée en remplacement d'une autre personne parvenue au terme de son détachement ; ».
Ce texte appelle les remarques suivantes.
Le maintien du salarié détaché au régime de sécurité sociale du pays d'envoi est « de règle » dans une situation particulière définie par les éléments qui ont été soulignés et qui constituent autant de conditions, à savoir :
1. Exercice préalable par le salarié d'une activité dans l'Etat d'envoi au service de l'entreprise qui le détache dans l'autre Etat.
2. Exercice de l'activité dans ce dernier Etat pour le compte de cette même entreprise.
3. Durée prévisible de l'activité dans le pays de détachement inférieure à 12 mois.
4. Enfin interdiction de l'envoi « permanent » de travailleurs détachés se remplaçant pour effectuer la même tâche.
La condition (1) doit être précisée à la lumière de la jurisprudence de la cour de justice des Communautés européennes (CJCE) qui a conclu :

En d'autres termes, l'embauche d'un salarié dans le seul but de le détacher ne fait pas obstacle au maintien de son affiliation au régime du pays d'envoi, y compris s'il s'agit d'un salarié mis à disposition, dans le second Etat, par une entreprise de travail temporaire installée dans l'Etat d'envoi.
Les Etats ont précisé la portée et les limites des dispositions de l'article 14-1 a), dans la décision n° 162 (du 31 mai 1996) de la commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants (mettant à jour les décisions précédentes adoptées à ce sujet, notamment la décision 128).
La condition tenant à l'exercice de l'activité dans l'Etat de détachement pour le compte de l'entreprise (2) installée dans le premier Etat a été ainsi explicitée :

Les Etats membres entendent écarter ainsi le risque de voir une entreprise s'installer sur le territoire d'un Etat à seule fin de mettre des salariés à disposition dans d'autres Etats en profitant du régime social avantageux du premier Etat.
L'exercice de son activité pour le compte de l'entreprise qui l'a détaché implique pour le salarié le maintien d'un lien organique et d'un rapport de subordination avec cette entreprise. Ce maintien s'apprécie à partir d'un faisceau d'éléments tels que la responsabilité en matière de recrutement, de contrat de travail, de licenciement et de détermination de la nature du travail à effectuer.
Il convient d'interpréter de façon stricte l'exigence d'une durée prévisible (3) du travail ne dépassant pas 12 mois.
L'objet du détachement est d'éviter tant aux travailleurs qu'aux employeurs et aux institutions de sécurité sociale les complications qui résulteraient de l'application de la règle générale de l'article 13-2 a) du règlement qui soumet les travailleurs à la législation du « pays d'emploi », en cas de périodes d'occupation de courte durée dans un Etat membre.
Cette disposition vise normalement le cas de salariés que leur entreprise envoie dans un autre Etat afin d'y effectuer un travail précis de durée nécessairement limitée. Aussi, une mission professionnelle qui serait par nature non limitée dans le temps ou dont la durée excéderait à l'évidence - de façon prévisible - la limite des 12 mois ne saurait en relever.
En d'autres termes, lorsque les conditions du détachement ne sont pas remplies, l'activité entraîne assujettissement au régime français dès le premier jour de son exercice. S'agissant du détachement dans un autre Etat membre, les caisses ne délivreront pas de formulaire E 101 dans une situation analogue. Les 12 mois ne constituent pas en effet une période de carence.
Le détachement répété (4) de salariés sur le même poste de travail doit pouvoir être facilement décelé et n'appelle pas de remarques particulières.
Certaines pratiques rendent, en revanche difficiles les contrôles des institutions, tant du pays d'envoi que du pays de détachement. Le souci d'éviter de telles situations se traduit dans la décision n° 162 précitée par le refus d'accorder le maintien au régime d'affiliation dans les cas où :
- l'entreprise d'accueil met le salarié à la disposition d'une autre entreprise ;
- le travailleur est mis à disposition d'une entreprise située dans un autre Etat membre ; - le travailleur est recruté dans un Etat membre pour être envoyé par une entreprise située dans un deuxième Etat membre auprès d'une entreprise d'un troisième Etat membre.

Les procédures

C'est l'institution d'affiliation qui établit, à la demande de l'employeur le formulaire E 101 : « attestation concernant la législation applicable », prévu par le règlement communautaire.
Ce document mentionne (notamment), outre l'institution « compétente » de l'Etat dont la législation reste applicable et la durée de ce maintien, l'entreprise qui détache le salarié et celle qui l'accueille dans le pays de détachement ; il précise laquelle des deux paye le salaire et verse, le cas échéant, les contributions ou cotisations.
Les institutions françaises, on le rappellera, ne sont pas destinataires du formulaire E 101 remis aux travailleurs détachés en France. Leur transmission, qui ne pourrait faire l'objet d'une exploitation systématique, constituerait une charge inutilement contraignante.
Toutefois, les renseignements que contiennent ces formulaires permettent d'effectuer, en cas de contrôle, les vérifications nécessaires. Ils permettent, en particulier, de s'assurer du maintien du lien organique avec l'entreprise qui a détaché le salarié ainsi que de la réalité du versement des contributions ou cotisations.
Dans le cadre de l'entraide admnistrative, ces mentions facilitent la recherche des informations auprès de l'institution du pays d'envoi concernant la réalité de l'activité exercée par l'entreprise qui détache, notamment le respect des conditions spécifiques imposées aux entreprises de travail temporaire rappelées ci-dessus.
L'attention des services de contrôle est appelée en effet sur les risques de contournement de la législation sociale française. La possibilité offerte par le règlement communautaire de maintenir le rattachement à la législation d'un Etat des salariés occupés temporairement dans un autre Etat peut être utilisée par certaines entreprises dans l'intention de soustraire ces salariés au régime social français jugé moins favorable du point de vue des charges qui leur incombent, voire d'échapper à toute obligation.
Il appartient en conséquence aux services des URSSAF amenés à effectuer des contrôles dans les entreprises où sont occupés des travailleurs détachés de vérifier systématiquement, notamment en interrogeant les institutions étrangères compétentes, et en liaison, si nécessaire avec l'inspection du travail, la réalité du détachement, c'est-à-dire :

L'embauche de salariés sur le territoire français (quelle que soit par ailleurs leur nationalité) par une entreprise établie dans un autre Etat membre ne peut en aucun cas permettre leur « détachement » en France. L'assujettissement de ces travailleurs à la législation de l'Etat où l'entreprise est établie ne reposerait en effet sur aucune base juridique.
Par ailleurs, l'envoi ou la mise à disposition répétés, en France, de travailleurs dans la même entreprise doit amener les services de contrôle à vérifier, pour chacun des détachements constatés, que le salarié n'a pas été envoyé en remplacement d'un autre salarié parvenu au terme de son détachement.
Dans ces deux cas, la validité du formulaire E 101 se trouve entachée.
En ce qui concerne plus particulièrement les entreprises de travail temporaire étrangères, qui constituent le biais de contournement de la législation sociale le plus utilisé, il est rappelé qu'elles ne peuvent intervenir légalement sur notre territoire que si les deux conditions cumulatives suivantes sont remplies :
1. L'entreprise exerce effectivement son activité (l'intérim) dans le pays d'envoi (voir plus haut). En effet, si l'activité est orientée exclusivement vers la France, on pourra qualifier celle-ci d' « établissement de fait » sur notre territoire, ce qui exclut ipso facto la situation de détachement.
2. L'entreprise se conforme aux exigences de la législation française du travail comme le prévoit l'article L. 341-5 du code du travail et son décret d'application n° 94-573 du 11 juillet 1994, en ce qui concerne :

L'application du droit français en la matière est conforme à la directive communautaire 96-71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services.
Ce texte a pour objet de déterminer dans quelles conditions les travailleurs que leur entreprise détache sur le territoire d'un Etat membre se voient garantir, en matière de durée du travail, de salaire, d'hygiène et de sécurité, etc. les conditions de travail et d'emploi prévues par les dispositions d'ordre législatif, réglementaire ou conventionnel prévues dans cet Etat.
La seule référence de la directive à la sécurité sociale figure au considérant n° 21 où il est indiqué que le règlement 1408-71 « ... fixe les dispositions applicables en matière de prestations et de cotisations de sécurité sociale ; ».
Aussi, le détachement dans le cadre d'une prestation de services n'appelle pas de remarques particulières s'agissant des conditions d'application de l'article 14 du règlement précité. Tout au plus doit-on admettre, compte tenu de la rédaction de l'article 1er de la directive, que les salariés visés par son champ d'application sont toujours maintenus à leur régime de sécurité sociale si les conditions touchant la durée du travail dans l'Etat d'accueil se trouvent remplies. En effet, la directive s'applique, dans les situations transnationales décrites, « pour autant qu'il existe une relation de travail entre l'entreprise d'envoi (ou l'entreprise de travail intérimaire) et le travailleur pendant la période de détachement ».
Le salarié détaché dans le cadre d'une prestation de services se trouve donc dans des situations contraires, au regard du droit de la sécurité sociale d'une part, et au regard du droit du travail (sauf exception prévue par la directive) d'autre part.

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On rappellera enfin, s'agissant du détachement vers un autre Etat membre, l'assouplissement des procédures de délivrance du formulaire E 101 en cas de détachement ne dépassant pas trois mois, prévu par la décision n° 148 de la commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, l'entreprise qui le souhaite pouvant disposer préalablement de formulaires munis d'un numéro d'ordre dont elle expédie un exemplaire à la caisse.

2.1.2. La prolongation du détachement

L'article 14, paragraphe 1, prévoit sous b) le cas où « la durée du travail à effectuer se prolonge en raison de circonstances imprévisibles au-delà de la durée primitivement prévue et vient à excéder 12 mois... » La prolongation du maintien d'affiliation jusqu'à l'achèvement du travail est possible, dans la limite de 12 mois, avec l'accord des autorités compétentes du pays de détachement.
La mise en oeuvre de ces dispositions dépend de la capacité des autorités ou institutions compétentes (cf. ci-après) à apprécier et, le cas échéant, contrôler le caractère imprévisible des circonstances dont il est question ici.
Indépendamment des remarques qui peuvent être faites sur ce point précis, il importe de noter que c'est principalement à cette occasion que seront faites les vérifications, non seulement sur la justification de la prolongation du détachement, mais aussi, a posteriori, sur la situation réelle du travailleur détaché au regard des dispositions de l'art. 14-1 a).
C'est en effet la prolongation du travail dont l'exécution a motivé le détachement qui justifie la demande de voir le travailleur maintenu à son régime au-delà de la durée prévue. S'il s'avérait que ce travail ne pouvait être réalisé dans le temps prévu, ou plus simplement que, par nature, il était impossible d'en fixer le terme, les conditions du détachement se trouveraient remises en cause. Une telle décision devrait naturellement se fonder sur des preuves solides et des raisons fortes, notamment la certitude que l'employeur a délibérément cherché à échapper à l'assujettissement au régime français.

Les procédures

Détachement dans un autre Etat membre : Il revient à l'employeur de demander la prolongation du détachement. Il utilise pour cela le formulaire E 102 qu'il remplit et adresse à l'autorité (ou l'institution désignée) du pays dans lequel le travailleur a été détaché.
Détachement vers la France : c'est, pour la France, le CSSTM qui reçoit les formulaires E 102 et délivre les autorisations prévues.
A la lumière des considérations ci-dessus, le CSSTM pourra être amené à interroger l'entreprise étrangère qui demande la prolongation, l'entreprise d'accueil et l'organisme qui a délivré le formulaire E 101. Dans l'hypothèse où il apparaîtrait que les conditions du détachement doivent être remises en cause, le CSSTM saisira les services de l'URSSAF afin que ceux-ci, après avoir effectué les contrôles et enquêtes requis, procède aux régularisations nécessaires.

2.2. Le maintien à leur régime d'affiliation des travailleurs non salariés
(art. 14 bis)

Des dispositions identiques à celles du détachement des salariés prévoient, à l'article 14 bis le maintien au régime de sécurité sociale du pays où ils exercent normalement leur activité des travailleurs non salariés qui effectuent temporairement un travail sur le territoire d'un autre Etat membre :

Les conditions de ce « détachement » sont néanmoins très différentes des précédentes. Rien ici qui rappelle le « lien organique » avec l'employeur ou qui puisse en tenir lieu. Il y a en fait « auto-détachement » du travailleur indépendant, situation relevant de la seule volonté de celui-ci.
Le formulaire E 101 attestant que la législation de l'autre Etat lui est applicable ne saurait être normalement refusé par l'institution auprès de laquelle le travailleur est affilié que si les contributions ou cotisations (lorsque la législation en cause en prévoit) ne sont pas versées.
Ces dispositions offrent donc des facilités considérables aux travailleurs indépendants pour exercer une activité transfrontalière, et des avantages indéniables (en terme de concurrence) si l'activité est exercée dans un Etat où les charges sociales sont plus élevées.
Par ailleurs, et l'on ne saurait trop insister sur ce point, la situation du « détachement » se distingue mal, s'agissant de travailleurs indépendants, des autres situations d'activité transfrontalière : activité exercée « normalement » ou successivement sur le territoire de deux ou plusieurs Etats.
En d'autres termes, comme pour les travailleurs salariés mais avec plus d'acuité, compte tenu du peu de contrainte que représente le « détachement » dans leur cas, le risque existe d'un détournement des dispositions évoquées dans le but de se soustraire à l'application de la législation du pays d'exercice de l'activité, en l'espèce la législation française.
Aussi doit-on insister particulièrement, en ce qui concerne les travailleurs indépendants, sur les règles de détermination de la législation qui leur est applicable :

Ces dispositions soulèvent, en dehors des points évoqués ci-dessus, de considérables difficultés d'application.
La contrainte que représenterait, pour les travailleurs indépendants exerçant de façon marginale une activité salariée dans un autre Etat membre, leur assujettissement, pour l'ensemble de leurs activités, à la seule législation de l'Etat où ils exercent leur activité salariée a sans doute fait renoncer les Etats à la mise en oeuvre des dispositions qui l'imposent (art. 14 quater a) pour les rares cas qui ne font pas l'objet de l'annexe VII précitée.
Une autre difficulté tient aux statuts différents donnés par les Etats membres à certaines professions : mannequins, artistes, dirigeants sociaux, etc., considérés comme salariés dans certains Etats, non salariés dans d'autres, et aux conséquences que l'on doit en tirer pour la mise en oeuvre de l'article 14 bis, paragraphe 1.
La CJCE s'est prononcée, le 30 janvier 1997 (arrêts rendus dans les deux affaires jointes C-340-94 et C-21-95) sur la manière dont il convenait d'interpréter la notion d'activité salariée et d'activité non salariée dans les cas d'activités exercées « normalement » ou « simultanément » sur le territoire de deux ou plusieurs Etats visées aux art. 14 bis par. 2 et 14 quater. Elle a conclu que pour l'application desdits articles, « il convient d'entendre par activités salariées et activités non salariées les activités considérées comme telles par la législation de sécurité sociale de l'Etat sur le territoire duquel elles sont exercées »
Il paraît légitime d'étendre la portée de cette conclusion au paragraphe 1 de l'article 14 bis. Dès lors, la qualification d'activité salariée, au sens de notre législation de sécurité sociale, d'activités exercées temporairement en France par des travailleurs relevant, dans l'Etat où ils exercent habituellement, d'un régime applicable aux travailleurs non salariés, doit conduire à écarter la mise en oeuvre des dispositions de l'article 14 bis, paragraphe 1 (maintien des intéressés à leur régime dans le cadre de l' « autodétachement ») au profit des dispositions de l'article 14 quater déjà cité. En effet, et sous réserve que la CJCE se prononce sur ce point, il paraît difficile d'admettre que des travailleurs indépendants demeurent rattachés, à ce titre, au régime de sécurité sociale d'un Etat membre tout en exerçant en France une activité entraînant, par exemple, la mise en oeuvre de la présomption de salariat.
Toutefois, afin d'éviter aux intéressés les difficultés évoquées plus haut résultant de leur assujettissement à la (seule) législation française pour l'ensemble de leurs activités, il a été convenu (lettre ministérielle du 22 avril 1997) de mettre en oeuvre dans ce cas l'article 13, paragraphe 2 a), qui entraîne leur affiliation au régime français pour les seules activités exercées en France.

Les procédures

Les formulaires E 101 et E 102 sont également utilisés pour les travailleurs non salariés.
Maintien et prolongation au régime français : afin de justifier qu'il reste soumis à la législation française, le travailleur non salarié qui exerce temporairement son activité dans un autre Etat membre doit demander l'établissement du formulaire E 101 à l'organisme auprès duquel il est affilié, c'est-à-dire à la caisse mutuelle régionale.
Il doit adresser la demande de prolongation à l'autorité compétente (ou l'organisme désigné par celle-ci) dans le pays d'accueil.
Maintien au régime d'un autre Etat membre : les institutions françaises n'étant pas destinataires des formulaires E 101 établis par les organismes étrangers, d'éventuelles anomalies ne peuvent être décelées qu'à l'occasion de contrôles. Ceux-ci doivent permettre de vérifier :

Dans les cas où sera mise en oeuvre la présomption de salariat, soit parce qu'une relation de subordination aura été établie, soit par application de la loi (article L. 762-1 du code du travail visant les artistes du spectacle), il y aura lieu de procéder à l'assujettissement des intéressés au régime général pour cette activité et de vérifier s'il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article 14 quater.
Prolongation du maintien au régime d'un autre Etat membre : c'est le CSSTM qui délivre les autorisations nécessaires (depuis le 1er janvier 1998) et se trouve donc destinataire des formulaires E 102. Il lui appartiendra de prendre les contacts nécessaires avec les organismes et, le cas échéant, les services locaux de l'Etat afin de vérifier le bien-fondé de la demande.

2.3. La conclusion d'accords selon l'article 17

L'article 17 du règlement donne aux Etats la faculté de « prévoir d'un commun accord, dans l'intérêt de certaines catégories de personnes ou de certaines personnes, des exceptions aux dispositions » relatives à la détermination de la législation applicable.
Cette disposition, qui permet de déroger aux règles générales et particulières qui déterminent la législation applicable aux travailleurs migrants, est utilisée soit pour remédier à des difficultés tenant à la spécificité de certaines législations ou aux lacunes de la coordination communautaire (dont le champ d'application excluait par exemple jusqu'à une date récente les régimes spéciaux de fonctionnaires), soit pour régulariser des situations auxquelles on ne saurait appliquer les dispositions prévues par le règlement sans inconvénient grave pour les travailleurs concernés, ou enfin dans le but de maintenir des travailleurs détachés à leur régime de sécurité sociale au-delà de la durée prévue aux articles 14 et 14 bis.
C'est ce dernier cas, le plus courant, qui est examiné ici.

2.3.1. Cas d'application de l'article 17

Comme cela a été indiqué plus haut [II.1.1 (3)], lorsque le salarié ne remplit pas les conditions de durée prévisible d'activité qui permettent l'application de l'article 14-1 a, il doit être assujetti au régime français dès le début de son activité sur notre territoire. Dans le cas où l'employeur souhaite néanmoins que le travailleur reste soumis à la législation de sécurité sociale de l'Etat d'envoi, il peut demander la conclusion d'un « accord article 17 ».
Ces accords relèvent de la volonté discrétionnaire des parties.
Le règlement pose toutefois l'exigence du respect de l'« intérêt » des personnes concernées, notion qui n'a pu faire l'objet d'une interprétation univoque par les Etats membres.
Les Etats ont apporté des éléments supplémentaires d'appréciation dans la définition du champ de l'article 17 dans la Recommandation n° 16 du 12 décembre 1984 de la Commission administrative pour la sécurité sociale des travailleurs migrants, qui vise « les travailleurs qui, en raison de leurs connaissances et aptitudes particulières ou du caractère particulier des objectifs de l'entreprise ou de l'organisation qui les occupe, sont détachés, dans l'intérêt de cette entreprise ou organisation, et au nom et pour le compte de celle-ci, pendant plus de 12 mois dans un Etat membre autre que celui où ils sont normalement occupés ».
On le notera, l'intérêt de l'entreprise s'ajoute ici à l'intérêt des travailleurs (rappelé dans l'un des considérants de la Recommandation).
S'agissant en effet de détachements de longue durée, les conditions d'opportunité peuvent prévaloir sur d'autres considérations. Par cette Recommandation, les Etats ont entendu préciser les cas dans lesquels il est particulièrement opportun d'accorder ce type de détachement.
Les cas d'application de l'article 17 dépassent bien entendu le cadre fixé par la Recommandation. Il s'agit le plus souvent de détachements « ordinaires » que la seule durée rend justiciables de cette disposition.
Aussi, la définition de critères sur lesquels pourraient être fondées les décisions d'accord ou de rejet importe moins que la détermination d'une politique, conformément d'ailleurs à l'esprit du texte communautaire. Le souci que l'on peut avoir de limiter les exceptions, tant afin d'éviter d'éventuels abus qu'en considération du haut niveau de protection qu'assure le régime français, est nécessairement tempéré par la préoccupation de voir accorder aux ressortissants de ce régime occupés temporairement dans les autres Etats membres les détachements prolongés qu'ils sollicitent des autorités compétentes de ces derniers.
La centralisation du traitement des demandes d'accords selon l'article 17 est de nature à faciliter la mise en oeuvre d'une telle politique, notamment à partir de l'exploitation des éléments statistiques sur les flux de détachements hors de France et vers la France.
Dans l'attente de cette analyse, un certain nombre de règles peuvent néanmoins être établies :

2.3.2. Durée du détachement

Les Etats ont fixé, chacun pour ce qui le concerne, des durées maximales de détachement en application de l'article 17.
La lettre ministérielle du 24 février 1985, reprenant sur ce point les instructions antérieures, a fixé à six ans la durée maximale du maintien au régime de leur pays d'origine, en application de l'article 17, des travailleurs occupés en France.
Ce texte fait par ailleurs référence à une durée totale de huit ans par l'ajout des deux années que permettent les dispositions de l'article 14-1. La limite de six ans, qui correspond à celle de notre législation interne, doit être conservée. On ne doit donc pas considérer qu'elle s'ajoute aux durées maximales prévues à l'article 14-1, les deux dispositions répondant à des situations et à des logiques différentes.
La lettre ministérielle précitée a réservé aux salariés dans les situations particulières évoquées dans la Recommandation, ainsi qu'aux journalistes, un traitement très favorable, leur détachement ayant une durée illimitée. Cette mesure, de caractère systématique, et portant sur des catégories limitativement énumérées, ne semble plus justifiée.
De la même manière, et sauf justification particulière, la limite de 6 ans devra être respectée pour les demandes de maintien au régime français.
Des accords visant soit l'ensemble des salariés d'une entreprise, soit des catégories particulières de salariés peuvent être conclus, notamment au niveau ministériel, et prévoir des durées de maintien au régime d'un ou de plusieurs Etats dépassant six ans. De tels accords négociés supposent la réciprocité.

La procédure

Le CSSTM assure le traitement des demandes d'accords selon l'article 17 et procède à la conclusion desdits accords.
Il peut être amené à interroger, outre les autorités qui le saisissent, l'entreprise étrangère qui demande la conclusion d'un tel accord ainsi que l'entreprise d'accueil.
Les accords nécessitant la mise au point de dispositifs particuliers ou comportant des durées de détachement exceptionnelles sont toutefois conclus directement par les autorités ministérielles, la direction de la sécurité sociale étant saisie des demandes y afférentes.
Nota : l'article 17 est applicable aux travailleurs non salariés comme aux travailleurs salariés. Il ne saurait toutefois être mis en oeuvre qu'exceptionnellement dans le but de maintenir au-delà d'un an (ou deux ans) un travailleur non salarié au régime de son pays d'activité habituelle. En revanche, il permet de régler des difficultés particulières ou de régulariser certaines situations.

III. - LE DÉTACHEMENT AU TITRE
DE LA SEULE LÉGISLATION FRANÇAISE

Aux termes de la loi (article L. 761-2 du code de la sécurité sociale), le détachement « interne » est soumis à la condition que l'employeur s'engage à s'acquitter de l'intégralité des contributions ou cotisations dues.
On notera, d'autre part, que la rédaction de l'article R. 761-1 (les travailleurs... « peuvent être admis au bénéfice... ») exclut la notion d'un détachement « de droit », aucune distinction n'étant faite par ailleurs entre la première période de trois ans et son renouvellement.
Les articles R. 761-1 et R. 761-2 (issus du décret n° 77-1367 du 12 décembre 1977) précisent en outre :

Ce dispositif juridique n'appelle pas de commentaire particulier sur le fond. On soulignera cependant que le détachement au titre de l'article L. 761-2 concerne les seuls travailleurs salariés.

Les procédures

Les caisses primaires d'assurance maladie sont seules à intervenir dans la procédure de détachement interne, dont l'arrêté du 22 mars 1978 a fixé les modalités.

IV. - LE RECUEIL DE STATISTIQUES SUR LE DÉTACHEMENT

Aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 22 mars 1978, « avant le 1er mars de chaque année les caisses primaires d'assurance maladie adressent à la direction régionale territorialement compétente un état des détachements accordés et des missions professionnelles dont elles ont été avisées au cours de l'année écoulée ».
C'est au Centre de sécurité sociale des travailleurs migrants que sont transmises désormais ces informations statistiques. Le CSSTM fera connaître aux caisses la forme sous laquelle ces données devront lui parvenir ainsi que les modalités et les délais de cette transmission.
Le CSSTM dressera par ailleurs la statistique des détachements de longue durée et des prolongations de détachement ayant donné lieu, au cours de l'année écoulée, au maintien ou à la prolongation du maintien à la législation française ou à une législation étrangère de sécurité sociale en application des accords bilatéraux et des règlements européens.
L'ensemble des informations ainsi recueillies seront traitées par le centre en vue de leur présentation dans le rapport statistique annuel de l'établissement.

V. - PROBLÈMES PARTICULIERS CONCERNANT
LE DROIT AUX PRESTATIONS
5.1. Les ayants droit

Le maintien de la couverture sociale du travailleur détaché à l'étranger résulte de la fiction juridique qui le fait réputer avoir conservé sa résidence et son lieu de travail en France. Cette fiction assure la continuité de la couverture des ayants droit demeurés en France ou qui accompagnent ou rejoignent le travailleur.
La question se pose toutefois de savoir dans quelle mesure des personnes peuvent acquérir la qualité d'ayant droit hors du territoire national.
L'article 4 de l'arrêté du 22 mars 1978 vise en effet le seul « cas où les membres de sa famille n'ont pas accompagné initialement le travailleur dans le pays de détachement mais le rejoignent ultérieurement... ».
Ni la lettre ni l'esprit des textes ne s'opposent toutefois à l'acquisition, à l'étranger, de la qualité d'ayant droit par des personnes à qui cette qualité serait reconnue sur notre territoire. On considérera donc que toute personne qui, admise à séjourner sur le territoire national, serait également admise au bénéfice des prestations en nature de l'assurance maladie maternité en qualité d'ayant droit, doit se voir reconnaître cette qualité dans le pays de détachement du salarié qui lui ouvre ces droits. Le conjoint et les enfants du salarié détaché remplissent à l'évidence les conditions requises.

5.2. Séjour du travailleur hors du pays de détachement

Le droit reconnu au travailleur détaché de bénéficier des prestations pour des risques survenus à l'étranger s'entend non seulement du pays de détachement mais aussi d'autres pays sur le territoire desquels le travailleur est amené à séjourner pour des motifs professionnels ou à l'occasion de congés.
Ce droit doit être reconnu également aux ayants droit du travailleur qui accompagnent celui-ci lors de ces déplacements.

*
* *

Vous voudrez bien me faire part des difficultés que vous pourriez rencontrer dans l'application des présentes instructions.

Pour la ministre et par délégation :
Le directeur de la sécurité sociale,
R. Briet
CONVENTIONS INTERNATIONALES DE SÉCURITÉ SOCIALE
au 1er juillet 1998

PAYSDATE
de la convention
ou de l'accord
DURÉE
maximale
de détachement
PROLONGATION
Algérie1er octobre 19803 ans2 ans
Etats-Unis2 mars 19875 ansNon
Andorre9 juin 19702 ansNon
Bénin6 novembre 19791 anJusqu'à achèvement du travail
Cameroun5 novembre 19906 moisNon
Canada9 février 19793 ansDurée indéterminée
Cap-Vert15 janvier 19803 ansJusqu'à achèvement du travail
Côte-d'Ivoire16 janvier 19852 ansJusqu'à achèvement du travail
Congo11 février 19871 anJusqu'à achèvement du travail
Gabon2 octobre 19801 an1 an
Guernesey *19 novembre 1965-Non
Jersey *29 mai 19791 anA convenir
Israël17 décembre 19651 anDurée indéterminée
Madagascar8 mai 19672 ansNon
Mali12 juin 19792 ans1 an renouvelable une fois
Maroc9 juillet 19653 ans3 ans
Mauritanie22 juillet 19653 ansNon
Monaco28 février 19526 moisDurée indéterminée
Niger28 mars 19731 anJusqu'à achèvement du travail
Iles Philippines7 février 19903 ans3 ans
Pologne9 juin 19486 moisDurée indéterminée
Québec12 février 19793 ansDurée indéterminée
Roumanie16 décembre 19763 ansDurée indéterminée
San-Marin12 juillet 19496 moisDurée indéterminée
Sénégal29 mars 19743 ansDurée indéterminée
Suisse3 juillet 19752 ansDurée indéterminée
Tchécoslovaquie12 octobre 19481 anDurée indéterminée
Togo7 décembre 19713 ansDurée indéterminée
Tunisie17 décembre 19653 ans3 ans
Turquie20 janvier 19723 ansDurée indéterminée
Ex Yougoslavie**5 janvier 19503 ansNon
* Echange de lettres.
** République fédérale de Yougoslavie (Serbie, Monténégro, Voivodine, Kosovo), Slovénie, Macédoine, Bosnie-Herzégovine, Croatie.