Bulletin Officiel n°98/36Cabinet du ministre

Circulaire MES/CAB/98-005 n° 98-537 du 30 juillet 1998 relative au devenir du fonds et des missions d'urgence sociale. Mise en place des commissions de l'action sociale d'urgence et d'une mise en réseau des points d'accueil des différents organismes

AS 4 43
2359

NOR : MESC9830346C

(Texte non paru au Journal officiel)

La ministre de l'emploi et de la solidarité à Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales) La présente circulaire a pour objet d'assurer la perennité de l'action menée depuis le début de l'année dans le cadre du fonds et des missions d'urgence sociale. Tirant les enseignements de celle-ci et en application des dispositions de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, il vous est demandé de mettre en place une commission de l'action sociale d'urgence afin de coordonner les dispositifs d'aide et de secours existants et d'assurer au demandeur, quel que soit le point d'entrée qu'il choisit, soit une réponse immédiate si l'institution saisie est celle qui est concernée, soit une transmission de son dossier à la commission, qui devra trouver le bon interlocuteur pour apporter l'aide d'urgence ou une réponse plus structurelle.

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Par circulaire du 12 janvier 1998, il vous avait été demandé de mettre en place un fonds départemental d'urgence sociale destiné à apporter des réponses immédiates aux personnes et aux familles en situation de détresse grave qui, malgré les dispositifs existants, sont exposées à des risques sérieux pour le maintien de leurs conditions d'existence.
L'Etat, principal financeur du fonds, a mobilisé à ce titre 1 milliard de francs sur son budget.
Après six mois de fonctionnement, le bilan du dispositif montre qu'il a atteint l'essentiel de ses objectifs. Plus de 800 000 personnes ont déposé une demande. Votre action, celle de vos services et de certains partenaires, dont je tiens à saluer l'efficacité, ont permis d'apporter des réponses rapides et ciblées à des situations de réelle difficulté.
Le FUS a confirmé l'ampleur mais aussi la diversité des phénomènes de précarité au sein d'un public souvent méconnu des services sociaux. Le succès inégal de vos efforts pour nouer des partenariats a également permis de vérifier la nécessité de remédier au cloisonnement et à la dispersion des dispositifs actuels.
Toutefois, comme l'ont indiqué les conclusions du rapport de Mme Join-Lambert, ce dispositif exceptionnel n'a pas vocation à être pérennisé sous sa forme actuelle.
Les présentes instructions ont pour objet de vous permettre de mettre en oeuvre le dispositif qui doit lui succéder, en application de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions qui vient d'être votée.

1. Le réaménagement du dispositif d'aide et de secours
est fondé sur sa coordination

L'amélioration des dispositifs d'aide et de secours s'inscrit désormais dans le cadre du programme et de la loi de prévention et de lutte contre les exclusions, dont plusieurs dispositions permettront d'agir structurellement sur les points sensibles révélés par le FUS :

Au-delà de ces mesures et de l'effort financier qui les accompagne, la clé de l'efficacité des aides aux personnes réside dans une meilleure coordination des aides existantes, déjà à l'oeuvre dans certains départements.
1.1. Il ne s'agit pas de créer une nouvelle allocation d'aide sociale obligatoire. Les fonds et dispositifs d'aide existants doivent permettre de pourvoir aux principaux besoins d'aide recensés, sous réserve de l'optimisation de leur fonctionnement
La réorganisation envisagée par le Gouvernement ne consiste pas à imposer la mutualisation des dotations de l'ensemble des fonds existants en les fusionnant dans un fonds d'urgence unique, qui serait une extension du fonds d'urgence sociale actuel.
Il s'agit, sur la base d'un accord des parties, de mieux coordonner les procédures d'attribution des divers systèmes d'aide existants, dans un cadre plus cohérent et plus favorable à leur complémentarité. A ce titre, l'action sociale facultative relevant de la compétence des collectivités locales et des organismes de protection sociale ou menée par les associations sera concernée. Il vous appartient de convaincre vos partenaires de l'efficacité d'un système coordonné.

1.2. La coordination sera le levier d'une meilleure efficacité
du système d'aide et de secours

L'objectif de la coordination des dispositifs d'aide existants est d'assurer à chaque demandeur d'aide ou de secours un accès facile à de multiples points d'accueil polyvalents.
Il est aussi d'assurer que sa demande soit orientée, sans autre intervention de sa part, vers la solution la plus adaptée, sans l'exposer à des procédures d'instruction redondantes et en évitant les ruptures de droits imputables aux dysfonctionnements administratifs. Ceux-ci devront être analysés, et il devra y être remédié au niveau local chaque fois que possible. Vous me ferez part des difficultés qui ne pourraient pas être résolues à ce niveau.
L'organisation qui sera mise en place devra enfin assurer au demandeur les meilleures conditions d'accueil, lui permettre de se faire entendre et, s'il le souhaite, de se faire assister par une personne de son choix, et faciliter sa compréhension de la décision prise (le refus devant être motivé).
La coordination ne supprimera pas la diversité des aides existantes, mais elle permettra de valoriser la complémentarité des interventions des acteurs et de neutraliser les effets de la complexité pour la personne.

1.3. Le dispositif sera fondé sur un examen global de la situation des personnes

Cet examen global permettra d'apprécier si le demandeur a bien fait valoir l'ensemble des droits et aides auxquels il peut prétendre et, si tel n'est pas le cas, d'engager avec lui les démarches nécessaires. Pour certaines personnes, cette approche globale pourra déboucher ensuite sur un accompagnement social ou un suivi spécialisé par un travailleur social.
2. La coordination des aides doit être institutionnalisée, outillée, pilotée
2.1. Vous vous attacherez à passer une convention avec le président du conseil général pour mettre en place une commission de l'action sociale d'urgence ainsi que la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions en prévoit le principe
Cette commission devra associer pour assurer son efficacité les représentants des services concernés de l'Etat, ceux du conseil général, des communes ou groupements de communes les plus importants, ainsi qu'un représentant des petites communes, des caisses d'allocations familiales et des autres principaux organismes de protection sociale, au sens large, concernés. Les autres partenaires qui le souhaiteront pourront s'associer au dispositif. La commission sera présidée par vous-même sauf disposition différente prévue par la convention passée avec le conseil général.
La commission aura pour mission :

2.2. Généralisation d'une polyvalence des « guichets » des différents organismes

Les « guichets » d'entrée dans les dispositifs d'aides doivent être multiples et facilement accessibles : CCAS, service social départemental, agence d'insertion dans les DOM, autres services instructeurs du RMI, mission locale/PAIO, CAF, CPAM, autres organismes conventionnés dans le cadre du comité de coordination.
Quel que soit le point d'entrée choisi par le demandeur, il devra désormais procéder au premier examen global de la situation de l'intéressé au regard de ses droits et constituer l'instance « référente » de sa démarche de demande d'aide, soit qu'il en prenne en charge lui-même l'instruction lorsqu'elle relève de sa compétence, soit qu'il saisisse directement, ou selon les modalités arrêtées par la commission d'action sociale d'urgence, le comité d'attribution d'un autre fonds qu'il estime plus approprié pour traiter la demande. Il lui reviendra de conserver le contact avec le demandeur jusqu'au retour de la décision le concernant.

2.3. Mise en place d'un formulaire national de demande d'aide et de secours

Ce formulaire comportera un volet normalisé au plan national et le cas échéant un volet complémentaire facultatif adapté à la situation locale.
La constitution de guichets polyvalents et l'examen global de la situation des demandeurs appelle en effet l'adoption d'un formulaire de base national, commun à l'ensemble des services instructeurs des demandes et exploitable informatiquement.
La mise en réseau de l'ensemble des guichets référents pourra utilement s'appuyer sur la gestion, par les partenaires, d'une application informatique portant répertoire socio-administratif de tous les intervenants, de leurs aides, de leurs barêmes, de leurs horaires d'ouverture, des personnes ressources, etc. à l'image de ce qui est mis en place, par exemple, en Charente.

2.4. Favoriser l'accompagnement des personnes en difficulté

Sans être associés à la prise des décisions individuelles, les organismes qui représentent et soutiennent les personnes en difficulté doivent pouvoir bénéficier d'une information régulière sur les orientations et les résultats du dispositif d'aides et de secours, pour être à même d'exercer au mieux leur fonction de représentation et d'accompagnement des personnes qui sollicitent l'intervention publique ou contestent ses décisions.

3. Mesures transitoires - Clôture des FUS

Les orientations qui précèdent permettront d'assurer la mise en oeuvre des articles 154 et suivants du titre III de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions, qui vient d'être votée.
Aussi, nous vous demandons d'engager dès à présent leur mise en oeuvre, en vous appuyant sur les dynamiques partenariales créées par les Missions d'urgence sociale.
Il importe en effet que les partenaires appelés à participer au dispositif coordonné soient saisis et que la mise en place des outils soit engagée dans les meilleurs délais.
Dès réception de la présente circulaire, vous prendrez donc toutes dispositions pour :

Les orientations qui précèdent sont centrées sur l'organisation de la coordination entre les dispositifs à caractère institutionnel. Cette préoccupation ne réduit en rien la nécessité d'accroître les contacts avec les organismes mettant en oeuvre une action sociale facultative ainsi qu'avec les associations caritatives afin d'améliorer l'analyse globale et partagée des besoins des usagers.
Il vous est rappelé enfin que le traitement des situations de détresse ne trouve pas sa fin dans l'aide et les secours d'urgence et que, conformément à l'esprit de la loi de lutte contre les exclusions, votre souci doit être constant d'aider les personnes en difficulté à construire des solutions durables.
La détermination et la compétence que vous avez manifestées pour mettre en oeuvre le Fonds d'urgence sociale témoignent de la capacité de l'Etat à jouer pleinement son rôle de garant de la cohésion sociale dans le respect des compétences de chacun. Votre action sera à ce titre décisive au cours des mois à venir.

Martine Aubry