Bulletin Officiel n°98/48Direction générales de la santé
Bureau VS 5

Avis du Conseil supérieur d'hygiène publique de France, section de la radioprotection concernant le rapport intitulé « évaluation de l'impact sanitaire des installations nucléaires en fonctionnement normal » (avis adopté en séance du 7 octobre 1998)

SP 4 436
3043

NOR : MESP9830475V

(Texte non paru au Journal officiel)

Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France a examiné à la demande du ministère chargé de la santé le rapport sur l'impact sanitaire des installations nucléaires élaboré par un groupe de travail mandaté par la direction générale de la santé.
L'avis du Conseil se fonde d'une part sur les connaissances scientifiques du moment, d'autre part sur les principes de radioprotection tels qu'énoncés par la commission internationale de protection radiologique (CIPR) et tels que traduits dans les textes réglementaires européens actuellement en cours de transposition dans le droit français.
Le risque sanitaire dû aux rayonnements est principalement celui de développer un cancer. Il s'ajoute aux autres cancers. Pour les niveaux de radioactivité très faibles correspondant à l'exposition du public résultant du fonctionnement normal des installations nucléaires, les études épidémiologiques menées jusqu'à ce jour n'ont pas mis en évidence de risque sanitaire. A titre de précaution, le risque est donc estimé par extrapolation de ce que l'on sait sur les effets des rayonnements à des niveaux d'exposition plus élevés, en supposant qu'il y a proportionnalité entre la dose d'exposition et le risque quel que soit le niveau d'exposition. On retient, faute de mieux, la dose efficace (1) comme indicateur de risque.
En fonctionnement normal des installations, la radioactivité et les doses ne peuvent pas être déterminées par mesure directe sur le public.
Les mesures et les méthodes de prédiction du comportement de la radioactivité dans l'environnement permettent d'évaluer et de mettre en évidence les transferts de radionucléides de la source à l'homme par dilution, dépôt et reconcentration et conduisent ainsi à une estimation de la dose pour un rejet donné. La connaissance de l'importance relative des différentes voies d'exposition permet d'optimiser les rejets des installations et de dimensionner le dispositif de surveillance.
Le conseil estime que le document du groupe de travail est une bonne synthèse méthodologique et attire l'attention sur les points suivants :
- la dose aux populations les plus exposées (2), doit être calculée de façon réaliste, et si possible, en fournissant un ordre de grandeur des intervalles de confiance, en évitant les majorations systématiques et en appliquant les modèles les mieux établis de comportement des radionucléides dans l'environnement et dans l'organisme.
- La surveillance autour des installations a un double objectif : assurer une fonction d'alerte en cas de dysfonctionnement et permettre de s'assurer de la validité des évaluations prévisionnelles de transfert dans l'environnement, à partir de mesures directes des rejets, de la mesure des produits consommables et de divers compartiments de l'environnement dont notamment des bioindicateurs « sentinelles » pouvant servir d'amplificateur ou de précurseur.
Des études méthodologiques, des études pilotes et des intercomparaisons entre les outils des différents acteurs nationaux et internationaux doivent être poursuivies pour améliorer la représentativité des modèles environnementaux et tirer le meilleur parti du dispositif de recueil et de gestion de données.
S'agissant de l'impact sanitaire, le conseil recommande que la surveillance de l'environnement soit complétée par une surveillance épidémiologique qui sera mise en oeuvre en se rapprochant des organismes spécialisés en la matière, entre autres, le Réseau national de santé publique (RNSP).
- Il est essentiel d'assurer une large diffusion des données et modèles tant des exploitants d'installations que des organismes de contrôle et d'expertise.
Par ailleurs, le Conseil prend note de la volonté des pouvoirs publics d'évaluer leur dispositif d'autorité et d'expertise. Ce dispositif inclut l'instruction des demandes d'autorisation, le contrôle du dispositif de mesure des exploitants, la surveillance de l'environnement, et enfin le relais des informations vers le public. Le Conseil recommande que soit établi un juste équilibre entre les contrôles réglementaires effectués par les exploitants et les contrôles réalisés indépendamment par les pouvoirs publics.
Au cas où le ministère chargé de la santé déciderait de rendre public le rapport étudié, le Conseil recommande de modifier son titre et de le remplacer par exemple par :
« Actualisation des études d'impact radiologique sur le public des installations nucléaires en fonctionnement normal. »
Cet avis ne peut être diffusé que dans son intégralité, sans suppression ni ajout.
Fait à Créteil, le 29 octobre 1998.

Le président de la section
de la radioprotection,
Professeur P. Galle

(1) La dose efficace tient compte, entre autres, des différents types de rayonnement et des sensibilités variables des différents tissus.
(2) Groupe de référence selon la terminologie de la radioprotection.