Bulletin Officiel n°2003-26Direction générale de la santé
Sous-direction de la gestion
des risques des milieux
DGS/SD 7 A
Bureau des eaux

Circulaire DGS/SD 7 A n° 2003-270 du 4 juin 2003 relative aux modalités d'évaluation et de gestion des risques sanitaires face à des situations de prolifération de micro-algues (cyanobactéries) dans des eaux de zones de baignade et de loisirs nautiques

SP 4 439
1855

NOR : SANP0330251C

(Texte non paru au Journal officiel)

Date d'application : immédiate.
Textes modifiés : circulaire DGS/SD 7 A n° 2002-335 du 7 juin 2002 relative à la campagne 2002 de contrôle sanitaire de la qualité des eaux de baignade (chapitre II-3 : conduite à tenir en présence de micro-algues [cyanobactéries]).

Le directeur général de la santé à Mesdames et Messieurs les préfets de région (directions régionales des affaires sanitaires et sociales [pour information]) ; Mesdames et Messieurs les préfets de département (directions départementales des affaires sanitaires et sociales [pour attribution]) Le développement de cyanobactéries dans les eaux de baignade et de loisirs nautiques constitue un problème sanitaire émergent. En effet les cyanobactéries (algues bleues) sont, dans certaines conditions et selon leurs types, susceptibles de produire différentes toxines (dermatotoxines, hépatotoxines, neurotoxines) et d'être à l'origine de troubles somatiques de nature et d'intensité variables tels que des démangeaisons, des gastro-entérites aiguës, voire des atteintes neurologiques. Ces troubles surviennent à la suite d'une ingestion ou éventuellement de l'inhalation d'eau contaminée. Les baigneurs et les personnes pratiquant des activités nautiques constituent les populations les plus exposées aux risques sanitaires liées aux cyanobactéries.
En l'absence de normes sanitaires françaises ou européennes pour les eaux de baignade spécifiques aux cyanobactéries, hormis les critères visuels réglementaires de qualité des eaux, j'ai saisi le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF), afin de préciser les critères d'évaluation des situations de prolifération de cyanobactéries et les modalités de gestion des risques sanitaires liés aux usages des zones de loisirs.
Vous trouverez ci-joint, l'avis du 6 mai 2003 du CSHPF, relatif aux mesures de gestion des risques sanitaires à mettre en oeuvre en fonction de l'importance des proliférations et des activités pratiquées (baignades, loisirs nautiques).
Je vous demande de transmettre cet avis aux maires et aux gestionnaires des zones de baignade et de loisirs nautiques concernés de votre département. Vous vous assurerez de la mise en oeuvre homogène à l'échelle du département, des dispositions de cet avis qui concernent notamment :

Toute situation de prolifération devra vous être signalée immédiatement par le gestionnaire du site ou le maire concerné. Les coûts engendrés par les analyses réalisées par les collectivités sont à la charge de ces dernières. Vous veillerez également à ce que des panneaux d'information à destination du public soient apposés sur le site et dans tout lieu approprié (mairie, office du tourisme,...) selon les modalités définies dans l'avis. Il vous appartiendra (DDASS) de demander à la mairie de compléter le panneau d'informations par tous éléments qui mériteraient d'être portés à la connaissance du public.
Je vous demande de présenter l'avis du CSHPF aux membres du conseil départemental d'hygiène. Vous le diffuserez également auprès des instances locales concernées (élus, conseils départementaux de l'ordre des médecins, des pharmaciens, structures sanitaires, structures d'urgence, etc.).
Vous voudrez bien me faire parvenir sous le présent timbre vos observations éventuelles ou les difficultés que vous rencontrerez dans l'application des présentes instructions, ainsi qu'un bilan chiffré des épisodes de prolifération de micro-algues survenus dans votre département pour le 30 septembre 2003.

Le chef de service,
Y. Cocquin

CONSEIL SUPÉRIEUR D'HYGIÈNE PUBLIQUE DE FRANCE
Section des eaux
Séance du 6 mai 2003

RECOMMANDATIONS POUR LA GESTION DES SITUATIONS DE CONTAMINATION D'EAUX DE BAIGNADE ET DE ZONES DE LOISIRS NAUTIQUES PAR PROLIFÉRATION DE CYANOBACTÉRIES

Avis

Considérant :

Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France, à la suite des travaux réalisés par son groupe de travail et après discussion,
1. Demande :

  • que soit validé un protocole permettant de définir et d'évaluer sur le terrain une « prolifération algale » pouvant déclencher la recherche de cyanobactéries et de leurs toxines ;

  • que soient validées et normalisées les stratégies et les méthodes de prélèvements et d'analyses relatives à la détermination d'une contamination des eaux de baignades et de zones de loisirs nautiques par des cyanobactéries et leurs toxines pour lesquelles des méthodes existent (dénombrement cellulaire, identification, quantification de toxines) ;
  • que soit réalisée une étude sur les contaminations des eaux de loisirs nautiques par les cyanobactéries et leurs toxines dans le but d'estimer les expositions à prendre en compte pour évaluer l'impact sanitaire sur les pratiquants de la baignade et des activités de loisirs nautiques ;
  • qu'une veille épidémiologique soit organisée pour identifier des cas de pathologies associées à des proliférations de cyanobactéries.
  • 2. Recommande :

    3. Estime que malgré l'absence de méthodes validées et normalisées de dénombrement et/ou de détection des cyanobactéries ou de leurs toxines, la mise en oeuvre d'une surveillance renforcée des sites de baignade, suivie d'une conduite à tenir détaillée comportant notamment l'information du public (cf. annexe), en cas de prolifération de cyanobactéries, constitue actuellement le moyen le plus approprié pour assurer la sécurité des utilisateurs des baignades aménagées et des zones de loisirs nautiques.
    4. Précise que l'arbre décisionnel devra être réexaminé à la lumière des expériences et des données acquises au cours de l'année 2003.

    Le sous-directeur de la gestion
    des risques des milieux,
    T. Michelon

    ANNEXE

    ÉVALUATION ET GESTION DES SITUATIONS DE CONTAMINATION D'EAUX DE BAIGNADES AMÉNAGÉES OU DE ZONES DE LOISIRS NAUTIQUES PAR PROLIFÉRATION DE CYANOBACTÉRIES

    1. Schéma décisionnel

    Mise en place, par les gestionnaires des sites, en liaison avec les services en charge du contrôle sanitaire réglementaire des baignades aménagées :

    Lors de cette surveillance, tout changement des caractéristiques du milieu (modification de la couleur, variations importante de pH entre le jour et la nuit, diminution de l'indice de Secchi, apparition d'efflorescences, d'écumes, etc.), ne pouvant être expliqué par des causes locales simples qui ne présentent pas de caractère dangereux (augmentation de la turbidité suite à une pluie abondante...) doit conduire le gestionnaire du site, privé ou public et les services des DDASS, à suivre la démarche suivante :
    Un (ou plusieurs) prélèvement(s) d'eau pour observation microscopique sont réalisés en des points représentatifs du plan d'eau où sont pratiquées des activités (baignade et loisirs nautiques). Ces prélèvements sont acheminés dans les meilleurs délais vers un laboratoire spécialisé pour la réalisation d'une observation microscopique, dans le but de rechercher la présence de cyanobactéries. Des dosages de chlorophylle a peuvent être réalisés mais ne peuvent être considérés comme des indicateurs spécifiques de cyanobactéries. En règle générale, il est important de considérer le fait que les efflorescences sont des phénomènes évolutifs et dynamiques parfois très rapides et qu'il importe d'adapter les fréquences d'échantillonnage en fonction de leurs évolutions (apparition des efflorescences, apparition des éventuelles toxines, disparition des efflorescences, disparition des toxines, déplacement selon les vents...).
    Si les cyanobactéries sont absentes ou présentes mais minoritaires, la surveillance renforcée est reconduite. Une observation microscopique de contrôle est réalisée après un délai d'une semaine.
    Si les cyanobactéries sont présentes et majoritaires, le dispositif de suivi de niveau I est déclenché :
    Niveau I : réalisation d'un comptage cellulaire et d'une identification des espèces de cyanobactéries.
    Si le comptage est inférieur à 20 000 cellules/ml  20 % (cyanobactéries en population majoritaire) :

    Si le comptage est compris entre 20 000 et 100 000 cellules/ml  20 % (cyanobactéries en population majoritaire) :

    Si le comptage est supérieur à 100 000 cellules/ml  10 % (cyanobactéries en population majoritaire), alors déclenchement du dispositif de suivi de niveau II.
    Niveau II : réalisation d'une recherche et d'une quantification de toxines.
    Pour ce faire, et en attente de méthodes normalisées, il est recommandé de procéder à une analyse selon la méthode d'inhibition de l'activité enzymatique de la PP2A exprimée en équivalent microcystine LR. Si le laboratoire ne dispose pas de cette méthode, et bien que ne donnant pas une réponse de même nature, il est également possible, de réaliser des dosages de microcystines par test immunologique (résultat exprimé en microcystine LR) ou avec les méthodes, plus précises mais plus onéreuses, par couplage chromatographie en phase liquide-spectrométrie de masse.
    Si le taux de microcystines est inférieur à 25 µg/l en équivalent microcystine-LR :

    Si le taux de microcystines est supérieur à 25 µg/l en équivalent microcystine LR :

    Information du public et des usagers du site par la pose de panneaux, notamment au niveau des zones de plus forte présence d'algues (variable en fonction du vent) et des zones d'usages :
    - surveillance : poursuite du suivi avec une fréquence hebdomadaire (dénombrement cellulaire, si ce dernier est supérieur à 100 000 cellules/ml, nouvelle mesure de concentration de toxines).
    Lors de la surveillance, la mise en évidence de la formation de mousse ou d'écume sur une aire de la zone doit immédiatement conduire au déclenchement du dispositif de suivi de niveau III :
    - gestion : interdiction de la baignade et de toutes les autres activités de loisirs nautiques dans les zones concernées. Prévenir tout contact de personnes ou d'animaux avec les écumes. Information du public et des usagers du site par la pose de panneaux, notamment au niveau des zones de plus forte présence d'algues (variable en fonction du vent) et des zones d'usages ;
    - surveillance : suivi de l'évolution des mousses ou écumes et de leur localisation, poursuite du suivi du site avec une fréquence hebdomadaire (dénombrement cellulaire et identification). Suivi des concentrations en toxines au moins bimensuel.

    2. Exemple de limitation des usages (1) exercée au sein des structures
    d'activités de loisirs nautiques

    Aviron La pratique de l'aviron est possible mais la découverte et l'initiation en skiff sont interdites
    VoileLa pratique de la voile est possible mais sont interdites :
    - la découverte et l'initiation à la voile sur dériveur instable (Laser, Moth, Topper) ;
    - toute activité sur dériveur (sauf bateaux collectifs stables de type Seil) à partir d'un vent de force 4 (*)
    PlancheLa pratique de la planche (à l'exception de l'entraînement des athlètes figurant sur les listes de haut niveau, les espoirs et les équipes de ligues, par vent inférieur à force 4 (*)
    CanoëLa pratique du canoë-kayak est possible mais sont interdites :
    - toute activité de canoë-kayak à partir d'un vent de force 4 (*) ;
    - toute pratique de découverte et d'initiation au canoë-kayak sur embarcation instable ;
    - la pratique du freestyle ;
    - la pratique du kayak-polo et du slalom sauf prise en compte par les clubs du niveau de pratique et d'aménagement de l'activité ;
    - l'utilisation d'embarcations de course en ligne à l'exception de l'entraînement en bateau monoplace des athlètes figurant sur les listes de haut niveau, les espoirs et équipes de ligues
    Autres embarcationsL'utilisation d'embarcations instables (barques, pédalo) ou entraînant un contact avec l'eau est interdite
    Autres dispositions - la baignade est interdite. Les pratiquants ne doivent pas se mettre dans l'eau pour embarquer ou débarquer, ni s'asperger ou se rafraîchir avec l'eau de la zone d'activité ;
    - le matériel et les équipements doivent être rincés après usage ;
    - en cas de contact avec l'eau au cours d'une activité nautique tolérée, une douche soignée doit être prise. Une consultation médicale sera nécessaire en cas d'ingestion d'eau et de survenue de troubles de santé de type : gastro-entérites, démangeaisons, conjonctivite...
    (*) Vent mesuré sur le plan d'eau.

    En cas de doute sur les résultats du suivi analytique et en fonction des conditions environnementales, des mesures plus contraignantes concernant la restriction de pratique des activités nautiques peuvent être prises par les autorités locales ou les responsables et éducateurs sportifs qui travaillent sur les zones d'activités nautiques.

    3. Exemple d'information du public

    Le CSHPF propose le message d'information type suivant à destination du public et des usagers dans le souci d'afficher une cohérence et une homogénéité des messages officiels.
    Les cyanobactéries sont des organismes microscopiques qui peuvent se développer dans les eaux douces et les eaux de mer et former des dépôts abondants et des mousses appelées « efflorescences algales ». Certaines espèces peuvent produire et libérer des toxines qui peuvent être à l'origine de risques sanitaires pour les baigneurs ou les pratiquants d'activités nautiques. Les effets actuellement connus sont les suivants :

    Les risques sanitaires liés aux situations de proliférations algales sont gérés sur la base des recommandations du Conseil supérieur d'hygiène publique de France du Les analyses effectuées sur ce site indiquent
    la présence de cyanobactéries à un nombre* Ce
    site fait l'objet d'une surveillance de la part des gestionnaires et des services de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Cependant certaines précautions doivent être prises et les interdictions éventuelles respectées :
    Eviter de se trouver en contact avec des zones de dépôts abondants et d'irisations de couleur verte et de mousses si * inférieur à 20 000 cellules/ml.
    Si * compris entre 20 000 et 100 000 cellules/ml, il est conseillé :

  • d'éviter d'ingérer et de respirer des aérosols de l'eau ;

  • de prendre une douche soignée après la baignade ou après l'activité nautique ;
  • de nettoyer le matériel et les équipements de loisirs nautiques ;
  • de consulter un médecin en cas d'apparition de troubles de santé.
  • Si * supérieur à 100 000 cellules/ml :



    (1) Source : direction départementale de la jeunesse et des sports avec la collaboration de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Loire-Atlantique.