Bulletin Officiel n°2003-46MINISTÈRE DE LA SANTÉ, DE LA FAMILLE
ET DES PERSONNES HANDICAPÉES
Direction générale de la santé

Avis du Conseil supérieur d'hygiène publique de France, section des maladies transmissibles, relatif à la conduite à tenir devant un cas de gale (séance du 27 juin 2003)

SP 4 445
3563

NOR : SANP0330587V

(Texte non paru au Journal officiel)

Considérant qu'en matière de santé publique :
La maladie touche les individus de tous âges et tous milieux sociaux ;
La gale est une maladie pouvant être responsable d'épidémie dans les collectivités (1) ;
La gale est une maladie très contagieuse due à un parasite, Sarcoptes scabiei hominis ;
La femelle fécondée colonise les couches superficielles de l'épiderme, pond 3 à 5 oeufs par jour pendant 2 mois, chaque oeuf donne une larve qui devient adulte en 2 à 3 semaines ;
La charge parasitaire peut atteindre quelques dizaines de parasites dans la gale commune et plusieurs milliers dans les gales profuses ;
Le parasite survit, hors de son hôte humain, pendant plusieurs jours jusqu'à une semaine ;
La dissémination du parasite est favorisée par la vie en collectivité et le non-respect des règles d'hygiène ;
Le facteur de risque de transmission est la cohabitation d'un grand nombre de personnes dans un espace restreint ;
La contamination est avant tout interhumaine, par contact cutané direct d'un sujet parasité à un autre sujet, particulièrement à l'occasion d'une relation sexuelle ;
Dans les gales profuses, la transmission indirecte est possible par contact avec des vêtements, literie, serviettes, fauteuils... parasités ;
L'immunodépression locale et/ou générale (corticothérapie, infection par le VIH...) constitue un facteur favorisant de gales profuses.
Considérant qu'en matière de diagnostic (6) :
La gale présente 2 formes cliniques :
- la gale commune ;
- les gales profuses, les plus contagieuses (gale hyperkératosique et gale disséminée inflammatoire) ;
La gale se manifeste par un prurit à recrudescence nocturne quasi-constant et le plus souvent par des lésions non spécifiques : lésions eczématiformes et de grattage, impétigo ;
La notion de contage et de prurit dans l'entourage est un élément très évocateur du diagnostic ;
Le traitement d'épreuve à visée diagnostique doit être évité : en effet, un prurit d'autre étiologie peut céder sous ce traitement et, inversement, le prurit de la gale peut être long à disparaître ;
Les lésions spécifiques (sillons, vésicules perlées, papulo-nodules) ne sont pas constamment retrouvées ;
La topographie des symptômes aux espaces interdigitaux dorsaux des mains, à l'aréole mammaire, aux organes génitaux externes (papulo-nodules), aux fesses, aux coudes, aux zones axillaires antérieures, sans atteinte du dos et du visage, est évocatrice du diagnostic de gale commune.
La topographie est d'aspect trompeur dans les gales profuses :
- l'atteinte du dos est fréquente dans la gale disséminée inflammatoire ;
- l'atteinte peut être généralisée dans la gale hyperkératosique avec prédominance des squames friables et parfois absence de prurit.
La gale commune du nourrisson présente des spécificités cliniques :
- l'éruption est le plus souvent vésiculopustuleuse, parfois papuleuse, prurigineuse, prédominante aux extrémités mais pouvant être plus diffuse le visage est habituellement épargné, une atteinte du cuir chevelu est possible ;
- les sillons sont inconstants, mais des nodules inflammatoires et prurigineux, (nodules scabieux), prédominants aux aisselles, au bas du dos et aux organes génitaux ne sont pas exceptionnels, ils peuvent être la seule manifestation clinique et persister plusieurs semaines ;
- le prurit en l'absence de lésion cutanée n'est pas un mode révélateur fréquent de la maladie ;
- une surinfection cutanée (impétiginisation) est fréquente, peut majorer l'éruption pustuleuse et entraîner adénopathies et fièvre ;
- le retard diagnostique est source d'épidémie.
La persistance d'un prurit dans les 8 à 15 jours après le traitement ne traduit pas forcément un échec, les causes pouvant être (5) :
- une irritation cutanée par le traitement ;
- un eczéma de contact ;
- une acarophobie ;
- autres causes de prurit masquées par la gale.
Le diagnostic de gale est établi sur les éléments suivants :
- présence de lésion clinique évocatrice et/ou un examen parasitologique positif ;
- en l'absence de prurit, l'examen parasitologique est nécessaire.
Considérant qu'en matière de traitement :
Il n'y a pas de guérison spontanée de la maladie, le traitement est justifié lorsque le diagnostic de gale est établi.
Il existe 2 types de traitements (4) :
- le traitement per os : l'ivermectine en prise unique à la posologie de 200 µg/kg. La sécurité d'emploi n'a pas été établie chez les enfants de moins de 15 kg ;
- les traitements locaux (en annexe) :
- toutes les régions du corps doivent être traitées, y compris le cuir chevelu et le visage s'il y a un doute sur leur atteinte ;
- les traitements locaux peuvent être irritants, d'autant plus qu'ils sont répétés.
Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France recommande devant un ou plusieurs cas de gale que ce soit la gale commune ou les gales profuses :
Au niveau individuel :
1. De traiter simultanément le(s) sujet(s) parasité(s) et toute personne ayant eu un contact intime avec le(s) malade(s), selon les modalités de traitement suivantes (2-4, 7-9) :
Pour la gale commune :
- le traitement est réalisé à domicile ; quel que soit le traitement choisi, le CSHPF estime que, dans l'état actuel des connaissances, il n'y a pas de niveau de preuve suffisant pour recommander préférentiellement un traitement per os ou par voie locale. Cependant, la facilité d'utilisation plaide en faveur du traitement per os et ce d'autant plus que le nombre de personnes à traiter est important.
Pour les gales profuses :
- le malade doit être isolé (le plus souvent, lors d'une hospitalisation) ;
- le traitement per os est recommandé et un traitement local peut être associé au traitement per os ;
- la définition des sujets contacts à traiter devant être large dans le cas de gales profuses en raison de la très forte contagiosité.
Un traitement antibiotique per os sera recommandé en cas d'impétiginisation.
2. De traiter à nouveau :
Tous les sujets qui ont des signes cliniques spécifiques de gale et/ou un examen parasitologique positif, persistant 8 à 15 jours après le traitement (résistance, réinfestation ou traitement insuffisant par incompréhension ou mauvaise observance) ;
Dans les gales profuses une deuxième dose du traitement per os et/ou l'association à un traitement local peuvent être nécessaires pour obtenir la guérison ;
Traiter à nouveau n'est pas justifié en présence de nodules postscabieux qui peuvent persister plusieurs semaines après un traitement, en particulier chez le nourrisson, en l'absence d'autres signes de gale.
Au niveau environnemental :
Les vêtements, les draps, les serviettes doivent être lavés, si possible en machine ;
Une désinfection de l'environnement n'est pas indiquée dans le cas de gale commune ;
La décontamination des lieux de vie par un acaricide est à décider avec les autorités sanitaires dans le cas de gale profuse.
Au niveau de la collectivité, (2-4) :
De mettre en place une stratégie de prise en charge de la collectivité par le médecin traitant, le responsable de l'établissement et les autorités sanitaires ;
En fonction du nombre et de la dissémination des cas dans la collectivité, de traiter au minimum toutes les personnes en contact avec le malade et au maximum toutes les personnes vivant, travaillant ou visitant l'institution et le cas échéant leur propre entourage, en privilégiant le traitement per os ;
De prévenir les familles des malades ;
Dans les collectivités d'enfants, une éviction est prévue jusqu'à 3 jours après le traitement pour une gale commune et jusqu'à négativation de l'examen parasitologique pour les gales profuses (10).

Références bibliographiques

1. Ancelle T. la gale dans les établissements pour personnes âgées en France en 1996 Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire 1997 ; 7 ; 27-9.
2. CClin Paris nord. Lutte contre les ectoparasites et agents nuisibles en milieu hospitalier, guide de bonnes pratiques mars 2001 : 17-24.
3. CDC. Guidelines for treatment of sexually transmitted diseases. MMWR. 2002 ; 51 ; RR-6.
4. Chosidow O. Scabies and pediculosis Lancet 2000 ; 355 : 819-26.
5. Chosidow O, Bécherel PA. Traitement de la gale. Revue Prat 2001 ; 51 : 1281-2.
6. Meinking TL. Infestations Curr Probl Dermatol 1995 ; 11 : 80-118.
7. Anonyme. Reconnaître et traiter la gale en 2002, revue Prescrire 2002 ; 22 ; 229 : 450-5.
8. Anonyme. Ivermectine, nouvelle indication : contre la gale, un traitement oral, efficace et d'emploi facile, revue Prescrire 2002 ; 22 ;229 : 405-9.
9. Walker CJA, Johnstone PW. Intervention for treating scabies. Cochrane review in the Cochrane Library Update Software, Oxford 2002, issue 2.
10. CSHPF. Guide des conduites à tenir en cas de maladies transmissibles dans une collectivité d'enfants. Séance du 14 mars 2003.
Cet avis ne peut être diffusé que dans son intégralité sans suppression ni ajout.

ANNEXE
LISTE DES SPÉCIALITÉS COMMERCIALISÉES POUR LE TRAITEMENT DE LA GALE

DÉNOMINATIONPRINCIPE ACTIF
et dosage unitaire
INDICATION
Contre-indication particulière
NLDATE
de l'autorisation
LABORATOIRE
Ascabiol, lotion pour application localeBenzoate de benzyle 10 g pour 100 ml
Sulfiram 2 g pour 100 ml
Traitement de la gale
Précautions chez l'enfant de moins de 2 ans
L 013322 janvier 1985Zambon France
Spregal, lotion en flacon pressuriséEsdépalléthrine 0,66 g pour 100 g
Butoxyde de piperonyle 5,3 g pour 100 g
Traitement local de la gale
Contre-indiqué aux sujets asthmatiques, nourrissons
L 012215 juin 1984Pharmygiène SCAT
Elenol, crème pour application localeLindane 1 g pour 100 g
Chlorhydrate d'amyléine 0,6 g pour 100 g
Traitement de la gale
Précautions chez l'enfant de moins de 2 ans
L 013630 novembre 1984Gerda
Scabecid 1 %, crème fluideLindane 1 g pour 100 gTraitement de la gale
Contre-indiqué chez l'enfant de moins de 2 ans
L 013017 juin 1986Stiefel
Stromectol 3 mg, compriméIvermectine 3 mg par comprimé 200 µg/kg en une seule priseTraitement de la gale sarcoptique humaine
Précautions chez l'enfant de moins de 15 kg
NL 2446119 novembre 1999Merck Sharp -
Dhome Chibret