Bulletin Officiel n°2004-15MINISTÈRE DE LA SANTÉ, DE LA FAMILLE
ET DES PERSONNES HANDICAPÉES
Caisse nationale d'assurance maladie

Circulaire  n° 2004-153 du 26 mars 2004 relative aux modalités opérationnelles de définition des zones géographiques en vue de l'attribution des aides à l'installation des médecins généralistes

SP 3 321
1167

NOR : SANH0430135C

(Texte non paru au Journal officiel)

Date d'application : immédiate.
Références :
Loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 portant loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;
Loi de financement n° 2001-1246 du 21 décembre 2001 portant loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 ;
Ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 modifiée relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de santé ;
Décret n° 2003-529 du 19 juin 2003 portant création de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé ;
Décret n° 2003-1140 du 28 novembre 2003 relatif à la détermination des zones déficitaires en matière d'offre de soins en vue de la détermination des aides à l'installation des médecins généralistes.

Le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées à Mesdames et Messieurs les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation (pour exécution et diffusion) ; Mesdames et Messieurs les préfets de départements, directions départementales des affaires sanitaires et sociales (pour exécution) ; Madame et Messieurs les préfets de régions, directions régionales des affaires sanitaires et sociales (pour exécution) Les perspectives démographiques des professionnels de santé font dès à présent apparaître un vieillissement et une diminution des effectifs avec, en filigrane, l'apparition de pénuries sur certains territoires.
Sur l'ensemble des médecins généralistes exerçant en France, 3 000 exercent déjà dans des zones fragilisées, notamment rurales. La préoccupation du Gouvernement vis-à-vis de cette situation a été rappelée par le Premier ministre lors du comité interministériel d'aménagement et du développement du territoire du 3 septembre 2003.
L'objet de la présente circulaire est de vous permettre d'identifier rapidement les zones déficitaires en matière d'offre de soins médicaux, en application du décret n° 2003-1140 du 28 novembre 2003 et de vous détailler les modalités d'attribution des aides proposées aux médecins généralistes.
Trois types de dispositifs complémentaires ont été créés afin de favoriser l'installation et le regroupement des médecins généralistes dans ces zones fragilisées :

I. - LA MISE EN OEUVRE DU DÉCRET N° 2003-1140
DU 28 NOVEMBRE 2003
I.1. - La marche à suivre

Le décret susmentionné prévoit que le préfet de région procède à la détermination des zones déficitaires en matière d'offre de soins. Pour ce faire, il s'adjoint la compétence technique du comité régional de l'observatoire de la démographie des professions de santé créé par le décret n° 2003-549 du 19 juin 2003.

I.2. - Le calendrier

La détermination de zones déficitaires en médecins généralistes doit permettre dans des délais très courts l'attribution des aides prévues.
S'agissant de l'aide d'Etat, le dispositif ci-dessous doit pouvoir être opérationnel dès le mois de mai 2004, ce qui suppose que vous ayez établi les zones éligibles d'ici au 15 mai 2004.

I.3. - Les critères à prendre en compte

Sont éligibles aux aides à l'installation des caisses d'assurance - maladie les médecins généralistes qui s'installent sur un territoire comportant au moins 5 000 habitants et dans lequel plusieurs conditions sont réunies. Ce territoire doit correspondre à un bassin cohérent de population : il pourra s'agir d'un canton ou d'un regroupement de communes ou de cantons en fonction des spécificités locales.
Pour être éligibles, ces territoires doivent satisfaire 3 au moins des 4 critères définis aux 1°, 2°, 3°, 4°.
1° Une accessibilité au médecin généraliste le plus proche supérieur à un délai raisonnable ;
2° Un ratio de présence médicale temps plein de médecin généraliste inférieur à trois médecins pour 5 000 habitants ;
3° Un volume d'activité par médecin supérieur à 7 500 actes par an pour les trois-quart des médecins temps plein recensés sur la zone ;
4° Soit une population de plus de soixante-quinze ans représentant au moins 10 % de la population, soit une population précaire supérieure à la moyenne régionale, soit un territoire classé en zone de revitalisation rurale (ZRR) ou éligible aux aides de la politique de la ville à quelque titre que ce soit (zones franches, zones de revitalisation urbaine, zones urbaines sensibles).
Ce dispositif ayant pour objet de favoriser l'implantation ou la réimplantation de médecins dans des zones menacées de désertification médicale, il convient de faire de ces critères une analyse pragmatique. La pratique isolée au sein d'un habitat lui-même dispersé est l'un des facteurs identifiés de fragilité, notamment en zone rurale, de l'installation des médecins libéraux. Il paraît, dès lors, opportun d'encourager tout particulièrement soit la création de cabinets de groupe, soit l'installation conjointe de plusieurs professionnels de santé.

I.3.1. - Le principal critère que vous prendrez en compte
pour déterminer les zones déficitaires est celui de la densité médicale

Ainsi vous considérerez que les autres critères méritent d'être analysés lorsque la densité médicale sur le territoire défini comme démographiquement cohérent est inférieure à l'équivalent de 1 médecin exerçant à temps plein pour 1 600 habitants.
Cette référence est à adapter lorsque des médecins n'exercent, soit pour des raisons de choix, soit en raison de leur âge ou de difficultés limitant leur activité, qu'à temps partiel. Il peut être ramené à une densité de l'ordre de 1 médecin pour 1 500 habitants par territoire lorsque le territoire pertinent (canton ou regroupement de cantons) comporte des particularités dont il vous appartient de tenir compte (vallées de montagnes enclavées, par exemple)
Vous veillerez néanmoins à ce que soit préservée la viabilité économique du cabinet, l'aide à l'installation ne devant pas avoir pour effet de subventionner des installations manifestement incapables de perdurer une fois écoulée la période de démarrage.

1.3-2. - Les autres critères doivent être analysés
comme des critères complémentaires

Le délai d'intervention : le délai de quarante minutes doit s'entendre de la durée totale du trajet aller-retour entre le cabinet du médecin et domicile du patient. Il doit correspondre à un délai maximal d'intervention, compte tenu des particularités climatiques qui, sans être exceptionnelles, caractérisent certains territoires (difficultés de circulation, routes difficilement praticables une partie de l'année). Vous veillerez notamment à ce que ce critère soit interprété avec discernement dans des zones géographiquement particulières.
Le comité régional de l'observatoire de la démographie des professions des santé pourra, à cet égard, faire appel à l'union régionale des caisses d'assurance maladie qui, dans la majorité des régions, a développé un logiciel permettant d'évaluer les distances kilométriques entre les médecins généralistes installés et leurs patients.
Le volume d'activité des médecins généralistes déjà installés.
Le nombre de 7 500 consultations et visites par an et par médecin doit être considéré comme un plafond au-delà duquel le médecin est en suractivité. Aussi, ce seuil a-t-il été retenu dans la charte de qualité de l'annexe II de la convention nationale des médecins généralistes.
Il est probable cependant que peu de zones soient confrontées à une telle suractivité.
L'importance de cette condition est donc à relativiser : d'une part, cette référence d'activité n'est applicable qu'à des médecins exerçant à temps plein ; d'autre part, ce critère ne doit être vérifié que pour les zones comportant au moins quatre médecins à temps complet. Lorsque le territoire comprend trois médecins, ce critère doit être satisfait pour deux au moins de ceux qui y exercent ; lorsque le nombre de médecins est inférieur à trois, vous considérerez que le critère est satisfait si au moins un médecin effectue une tel niveau d'activité. Si aucun médecin n'exerce dans le territoire, et même si celui-ci est desservi par un médecin venant d'un secteur voisin, vous considérerez que le critère est, par définition, satisfait.
Des critères liés aux difficultés particulières des territoires.
Les critères suivants sont relatifs au pourcentage de personnes âgées dans la population, à la précarité sociale de la population du territoire, ainsi qu'à la prise en compte des difficultés des territoires. Ils doivent également être pris en compte pour étayer votre décision :
a) La proportion de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans doit être supérieure à 10 % (1) de la population sur le territoire considéré ;
b) La proportion de personnes bénéficiaires, assurés ou ayant droit - conjoint, enfant, concubin, conjoint divorcé, conjoint séparé, conjoint veuf, ayant droit collatéral ascendant ou autre ayant droit - soit de minima sociaux, soit de la couverture médicale universelle, soit souffrant d'une affection de longue durée est supérieure à la moyenne nationale, soit 2 % de la population.
Le nombre de personnes allocataires de minima sociaux est d'environ 10 % de la population
Enfin, 5,7 millions de personnes, soit 12 % des assurés sociaux souffrent d'affections de longue durée et bénéficient à ce titre d'une prise en charge à 100 % de leurs dépenses de santé.
Compte tenu du délai imparti pour la détermination des zones, et toujours en vue d'affiner votre analyse, il suffit que la proportion de population visée soit supérieure à l'une de ces trois moyennes nationales pour que cette catégorie de critères soit considérée comme satisfaite sur le territoire considéré.
c) Le territoire considéré est qualifié au titre de la politique de la ville (2) ou de revitalisation rurale, quelle que soit l'appellation de la zone (zone de revitalisation rurale, territoire rural de développement prioritaire, etc.).

I.4. - Les avis à recueillir

Lors de l'examen de toute demande d'aide, outre la consultation du comité régional de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé, le préfet devra avoir recueilli les avis :

II. - LES MODALITÉS PRATIQUES D'ATTRIBUTION

Les modalités d'attribution de cette aide sont fixées par un décret en Conseil d'Etat : dans l'attente de sa publication, les contreparties exigées seront fixées par la présente circulaire.
Le médecin généraliste qui souhaite bénéficier d'une aide à l'installation doit en faire la demande par écrit auprès de l'union régionale des caisses d'assurance maladie.
La décision d'attribution de cette est prise par le directeur de l'union régionale des caisses d'assurance maladie.
L'obtention de l'aide à l'installation est subordonnée à l'installation et l'exercice effectif du médecin bénéficiaire dans une zone déficitaire pour une période minimale de cinq ans. Cette aide ne peut être attribuée qu'une seule fois par médecin pour l'installation dans la zone.
La convention conclue entre le médecin généraliste bénéficiaire de l'aide et l'union régionale des caisses d'assurance maladie rappelle les obligations et engagements des parties et précise notamment le lieu d'installation et le montant de l'aide, celui ci pouvant être modulé.

II.1. - L'aide de l'Etat
II.1.1. - Les principes d'action de l'aide d'Etat

Dans la loi de finances rectificative pour 2003 est inscrite une dotation d'un montant de 2 millions d'euros destinée à financer une aide aux médecins généralistes s'installant ou se regroupant dans une zone déficitaire
Le principe retenu est d'attribuer une aide substantielle d'un montant de 10 000 euros par an et par médecin pendant cinq ans à compter de leur installation ou de leur regroupement. Ces aides sont destinées au financement des dépenses de toute nature effectuées par un médecin pendant les cinq années suivant son installation ou son regroupement, dans le cadre de son exercice. Afin de mener une politique cohérente avec celle de l'union régionale des caisses d'assurance maladie, l'aide à l'installation doit obligatoirement être servie en complément de l'aide définie à l'article 25 de la loi de finances de la sécurité sociale pour 1999.
En revanche, le champ de cet article ne permettant à l'union régionale des caisses d'assurance maladie d'attribuer une aide favorisant le regroupement de professionnels libéraux déjà installés en zone déficitaire, l'aide au regroupement sera attribuée par vos seuls services.
L'aide doit être versée dans le cadre d'un contrat d'installation et/ou de regroupement (CIR) signé entre l'Etat et chaque médecin. Ce dernier, qu'il s'installe ou se regroupe, outre les contreparties prévues pour l'attribution de l'aide du fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale (FORMMEL), s'engage à se maintenir pour une durée minimale de cinq ans sur le territoire.

II.1.2. - Les modalités opérationnelles de mise en oeuvre

Afin que l'attribution de l'aide de l'Etat se fasse de la manière la plus transparente possible, vous procéderez à la publicité requise sur ce dispositif, dès lors que les périmètres des zones éligibles auront été définis.
La versement de l'aide de l'assurance maladie ouvre droit à l'octroi de l'aide de l'Etat dont le versement est effectué au fur et à mesure de la production des factures des dépenses d'investissement.
Dans le cas d'une demande d'aide à l'installation, vous instruirez le dossier sur récépissé de la décision favorable de l'union régionale des caisses d'assurance maladie. Dans le cas d'une aide au seul regroupement, vous instruirez le dossier dès réception de la demande.

II-2. - Dispositions budgétaires

Il appartient à chaque direction régionale d'instruire les dossiers de demandes de financement et de solliciter au fur et à mesure des besoins la déconcentration des crédits nécessaires à la fin de chaque trimestre au vu des dossiers instruits ayant donné lieu à une décision de financement, auprès de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins (DHOS), bureau G3.
Vous m'adresserez vos premières demandes de financement pour le 30 juin prochain.

II.3. - L'aide des collectivités locales

Dans le cadre du projet de loi sur le développement des territoires ruraux actuellement examiné par le Parlement, les collectivités locales qui le souhaitent pourront librement choisir de s'associer au financement de l'aide aux côtés de l'Etat et de l'assurance maladie.
Outre la détermination des zones déficitaires en médecins généralistes, vous êtes donc invités à vous rapprocher des collectivités locales ou leurs groupements concernés afin de favoriser une coordination des dispositifs.
Vous tiendrez informée la DHOS des difficultés qui pourraient résulter de la présente instruction.

J.-F. Mattei

ANNEXE
EXEMPLE DE CONVENTION
Convention

Entre :
l'Etat, ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées, 8, avenue de Ségur, 75350 Paris 07 SP, représenté par le représentant de l'Etat dans la région Ile-de-France,
D'une part, et
Le médecin généraliste, contractant :
Nom, prénom
Adresse
D'autre part
il est convenu ce qui suit :

Article 1er
Objet de la convention

Le contractant désigné ci-dessus s'engage à exercer effectivement, qu'il s'agisse d'une première installation ou d'un regroupement, dans la commune de (lieu, adresse)
pendant une durée minimale de cinq années.
Il s'engage également à participer à la permanence des soins
(engagements librement négociés entre les parties)
En contrepartie de l'engagement du contractant, l'administration s'engage à lui verser une somme de X euros par an pendant cinq (5) ans pour les X demi-journées par semaines effectuées par le contractant à l'adresse X dans la zone déficitaire Y. Cette somme ne peut dépasser dix mille (10 000) euros par an.

Article 2
Domiciliation des versements

Les versements afférents à la convention susvisée seront effectués au compte du contractant n° 

Article 3
Conditions d'utilisation de l'aide attribuée

Conformément à la réglementation en vigueur, toute aide non utilisée devra être reversée au Trésor public. Il en est de même de l'utilisation de l'aide à d'autres fins que celles prévues initialement.

Article 4
Résiliation de la convention

La non-utilisation de l'aide dans le délai fixé à l'article 3 ci-dessus, de même que l'utilisation de fonds publics non conforme à sa destination initiale ou la non-production du compte d'emploi dans le délai mentionné à l'article 4, entraîneront la résiliation de la convention.

Article 5
Engagements du contractant

L'organisme s'engage à informer l'administration sur les faits suivants :

  • demande de subvention ou d'aide faite à une autre administration ou un tiers pour le même objet ;

  • retard pris dans l'exécution de la convention ;
  • projet de modification de la nature, de la durée ou du lieu d'exercice ;
  • projet de cessation d'activité.
  • Article 6
    Cessation d'activité

    En cas de cessation d'activité sur la zone déficitaire considérée, pour quelque cause que ce soit, pendant la durée d'exécution de la convention, le contractant devra rembourser à l'administration les sommes perçues.

    Article 7
    Renseignements administratifs

    L'ordonnateur de la dépense est le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
    Le comptable assignataire est le payeur-général du Trésor.
    La dépense est imputée sur les crédits ouverts au chapitre l'article ? du budget santé, de la famille et des personnes handicapées

    Article 8
    Litiges

    Les litiges survenant du fait de l'exécution de la présente convention, seront portés devant le tribunal administratif de Paris.
    Fait à Paris, le........

    Pour le ministre de la santé,
    de la famille et des personnes handicapées :
    Le contractant,

    (date et signature)


    (1) En France, fin 2002, 3,3 millions de personnes sont allocataires des minima sociaux. Ces minima couvrent au total une population de 6 millions de bénéficiaires, donc environ 10 % de la population.
    (2) Les territoires qualifiés au titre de la politique de la ville sont, en application des dispositions de la loi n° 95-115 du 4 février 1995, loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire : les zones franches, les zones de revitalisation urbaine et les zones urbaines sensibles.