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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Ressources – Situation matrimoniale – Séparation – Décision – Erreur – Compétence juridictionnelle

Dossier no 130328

M. X…

Séance du 2 décembre 2014

Décision lue en séance publique le 16 janvier 2015

Vu le recours en date du 30 mars 2013 et le mémoire en date du 17 mars 2014 présentés par M. X… qui demande l’annulation de la décision en date du 29 janvier 2013 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté son recours tendant à l’annulation de deux décisions de la caisse d’allocations familiales de Lille en date du 26 novembre 2008, la première lui assignant un indu de 30 598,52 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de mai 2000 à avril 2007, et la seconde relative à un indu de prime de Noël d’un montant de 1 067,15 euros au titre des années 2000 à 2006 ;

Le requérant conteste l’indu ; il fait valoir que son épouse est « partie » en avril 2000 et conteste la vie commune avec cette dernière ; qu’il est âgé de 69 ans et que, tant sa retraite que celle de son épouse, font l’objet de saisies ; qu’il a demandé à être entendu par la commission départementale d’aide sociale du Nord mais qu’il n’a jamais été convoqué ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les pièces desquelles il ressort que M. X… s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 2 décembre 2014, M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du code de l’action sociale et des familles : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 262‑35 du même code : « (…) Le versement de l’allocation est subordonné à la condition que l’intéressé fasse valoir ses droits aux créances d’aliments qui lui sont dues au titre des obligations instituées par les articles 203, 212,214, 255 (…) du code civil (…) » ;

Considérant qu’aux termes de l’article 212 du code civil : « Les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance » ;

Considérant qu’en vertu de l’article L. 262‑41 in fine du code de l’action sociale et des familles modifié par la loi no  2004‑809 du 13 août 2004  Art. 58 (V) JORF 17 août 2004 en vigueur le 1er janvier 2005 : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général » ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑41 in fine du code de l’action sociale et des familles en vigueur au 25 mars 2006 : « La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ;

Considérant que M. X… a été admis au bénéfice du revenu minimum d’insertion en avril 2000 au titre d’une personne isolée ; que suite à deux contrôles de l’organisme payeur diligentés en janvier et mars 2007, il a été constaté que M. X… vivait toujours avec son épouse qui était salariée et dont il avait déclaré être séparé ; qu’il s’ensuit que par deux décisions de la caisse d’allocations familiales en date du 26 novembre 2008, le remboursement de la somme de 30 598,52 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de mai 2000 à avril 2007 et de la prime de Noël d’un montant de 1 067,15 euros au titre des années 2000 à 2006, ont été mis à sa charge ; que l’indu a été motivé par la circonstance que l’intéressé a avait omis de déclarer sa situation familiale exacte et qu’ainsi, il a bénéficié à tort du revenu minimum d’insertion ; que, par ailleurs, le président du conseil général du Nord a déposé plainte auprès du procureur de la République ;

Considérant que M. X… a saisi la commission départementale d’aide sociale du Nord qui, par décision en date du 29 janvier 2013, l’a rejeté en application de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles ; que toutefois, l’indu litigieux porte majoritairement sur la période antérieure à mars 2006 ; qu’ainsi, les dispositions précitées de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles applicables avant l’intervention de la loi du 23 mars 2006 entrée en vigueur le 25 suivant ne font pas, en toute hypothèse, obstacle à ce qu’il en soit accordé une remise gracieuse ; que, par ailleurs, M. X…, par lettre en date du 26 janvier 2009, a souhaité être entendu par ladite commission mais n’a pas été convoqué ; qu’ainsi, la commission départementale d’aide sociale du Nord a méconnu la portée de la législation applicable et les droits de M. X… ; que dès lors, sa décision encourt l’annulation ;

Considérant qu’il y a lieu de d’évoquer et de statuer ;

Considérant que la commission centrale d’aide sociale est incompétente pour connaître des décisions portant refus d’attribution des aides à la charge de l’Etat, dont le contentieux ressort de la compétence des tribunaux administratifs ; que les conclusions relatives à la prime de Noël sont, par suite, irrecevables ;

Considérant que le conseil général du Nord a émis, en date du 27 septembre 2012, un titre exécutoire, suivi d’une relance et d’un commandement à payer de la direction générale des finances ; que l’émission du titre exécutoire, alors que l’affaire était pendante devant la commission départementale d’aide sociale du Nord et que le contentieux n’était pas épuisé, s’est faite dans des conditions contraires à la loi ;

Considérant que, nonobstant le courrier en date du 26 décembre 2012 d’un avocat qui indique qu’il a été commis pour demander une pension alimentaire à l’épouse de M. X…, aucune séparation des époux X… n’a été actée par le juge ; qu’il y a lieu, dès lors, de considérer que la situation matrimoniale de M. X… durant la période litigieuse était régie par l’article 212 du code civil susvisé ; qu’il suit de là que l’indu, qui a été motivé par le défaut de prise en compte des salaires perçus par l’épouse de M. X…, est fondé en droit ;

Considérant que M. X… est âgé de 69 ans ; qu’il a déclaré 8 664 euros de retraite pour l’année 2011, soit une retraite mensuelle de 722 euros, et que son épouse perçoit une retraite de 701,64 euros mensuels depuis février 2009 ; qu’il a été versé au dossier les déclarations trimestrielles de ressources qui couvrent la période litigieuse qui font apparaître que M. X… n’a jamais renseigné sa situation familiale exacte et les salaires de son épouse ; que M. X… n’a pu se méprendre sur les conditions de leur cumul avec l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que l’indu procède d’une omission volontaire durant toute la période litigieuse qui a perduré ; que conformément aux dispositions précitées de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles, la créance ne peut être remise ou réduite ; qu’il s’ensuit que, pour la période d’avril 2006 à avril 2007, son recours ne peut qu’être rejeté ;

Considérant que, pour ce qui concerne la période de mai 2000 à mars 2006, il ressort des pièces versées au dossier que M. X… n’a pas sollicité de remise gracieuse auprès du président du conseil général du Nord ; que s’il entendait solliciter l’application de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles, il lui appartiendrait au préalable de saisir le président du conseil général d’une telle demande ou, s’il s’y estime fondé, de solliciter auprès du payeur départemental le rééchelonnement du remboursement de sa dette,

Décide

Art. 1er La décision en date du 29 janvier 2013 de la commission départementale d’aide sociale du Nord est annulée.

Art. 2.  Le recours de M. X… est rejeté.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à M. X…, au président du conseil général du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 2 décembre 2014 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. BENHALLA, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 16 janvier 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidenteLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET