« Améliorer la sécurité des patients et des résidents » : la 1ère feuille de route 2023-2025 du ministère

A l’occasion de la 13ème édition de la semaine de sécurité des patients qui avait pour thématique « Faire des patients les acteurs de leur propre sécurité », la DGOS a lancé la 1ère feuille de route 2023-2025 « Améliorer la sécurité des patients et des résidents ». La sécurité des patients fait partie intégrante de la politique d’amélioration de la qualité et de la pertinence des soins et constitue un enjeu majeur de santé publique. C’est pourquoi cette feuille de route s’inscrit également dans la continuité du programme national pour la sécurité des patients (PNSP) 2013-2017 qui avait permis de faire émerger la notion de culture de sécurité et la nécessité d’associer étroitement les patients.

L’ambition portée par cette feuille de route est notamment de renforcer la culture de sécurité avec pour objectif de réduire la survenue d’événements indésirables associés aux soins que l’on sait évitables.

En février 2023, la direction générale de l’offre de soins a validé la mise en place d’un comité de pilotage chargé de la conception et du suivi de la feuille de route. Ce comité se compose de la HAS, de l’AFDS, de la FORAP, de France Assos Santé, de représentants d’ARS, de la DGS et de la DGOS.
En juin dernier, les membres du comité de pilotage ont validé la structuration de la feuille de route 2023-2025 « Améliorer la sécurité des patients et des résidents » ainsi que les actions qui la composent.

Ainsi, la feuille de route se décline en 2 objectifs transversaux et 5 axes de travail qui se traduisent en 26 actions concrètes.

De nombreux outils et méthodes permettant de contribuer à la sécurité des patients existent déjà mais sont encore peu connus ou méconnus par les professionnels. Cet objectif transversal vise à mettre en place une stratégie de communication efficace pour diffuser largement et faire s’approprier par les équipes les démarches existantes. La feuille de route elle-même devra faire l’objet d’une communication élargie auprès de l’ensemble des acteurs mais également auprès des patients afin de les mobiliser en tant que co-acteurs de leur sécurité.

Action 1 : Construire un plan de communication sur la feuille de route destiné aux acteurs de terrain et aux usagers

Action 2 : Communiquer et faire connaitre ce qui existe déjà
Les outils ou dispositifs sur lesquels il est prévu de communiquer largement auprès des professionnels et des patients sont les suivants :
  Les démarches d’amélioration du travail en équipe (programme d’amélioration continue du travail en équipe, accréditation des spécialités à risques, les rencontres sécurité…)
  Les outils déjà disponibles (check list Bloc Opératoire ; guide HAS/FORAP sur la gestion des évènements indésirables…)
  Les acteurs et les ressources existantes (RRéVA, SRA…)
  Le portail national de signalement des évènements sanitaires indésirables

La sécurité des soins est une attente légitime des usagers et doit être une part incontournable de la formation de soignants. L’enseignement des principes et démarches de gestion des risques, en formation initiale ainsi que tout au long de la vie professionnelle des soignants, est essentiel. Des formations axées sur le travail en équipe, le développement de la culture sécurité et les facteurs organisationnels et humains permettraient de fiabiliser les organisations et les pratiques et de contribuer également à la qualité de vie au travail des professionnels.

Action 1 : Renforcer les enseignements sur la culture sécurité en formation initiale des études en santé

Cette action vise à intégrer des connaissances sur la culture sécurité dès le début de la formation des professionnels de la santé Ces enseignements sont incontournables pour s’assurer que les futurs professionnels acquièrent une sensibilité et une compréhension précoces des enjeux liés à la sécurité des patients. Cela leur permettra de développer des compétences essentielles, telles que la prise de décisions éclairées, la communication efficace, et la gestion des risques, qui sont fondamentales pour éviter les évènements indésirables associés aux soins (EIAS). Ainsi, en investissant dans la formation initiale des soignants, on cible à terme un système de soins plus sûr et de meilleure qualité pour tous les patients.

Action 2 : Dispenser des formations sur la sécurité des patients axées sur l’équipe et les facteurs humains

Les évènements indésirables associés aux soins (EIAS) sont le plus souvent liés à un défaut d’organisation, de coordination ou de communication au sein des équipes. Pour améliorer la qualité du travail en équipe et préserver la sécurité des patients, la HAS propose déjà plusieurs programmes et de nombreux outils.
Dans un contexte hospitalier où le temps disponible au sein des équipes est très contraint, cette action a pour but de favoriser les temps de rencontre des professionnels, en complément des autres méthodes (Pacte ou rencontres sécurité). Pour cela, il est proposé de sensibiliser les équipes à l’importance des temps collectifs, de formaliser une stratégie d’intégration des nouveaux arrivants et des intérimaires et de réaliser une boite à outils pour améliorer la communication.

Action 3 : Renforcer la prise en compte des compétences non techniques

L’expertise technique (poser un cathéter, intuber un patient, reconstituer un médicament, etc.) des professionnels de santé ne suffit plus dans la poursuite de la réduction et la récupération des événements indésirables associés aux soins, et pour innover et transformer les organisations de santé. Différentes publications mettent en avant les défaillances relatives à la fatigue, la gestion du stress, la prise de décision, le travail en équipe, etc. qui sont des facteurs clés de la qualité et la sécurité du patient.
> Régis FUZIER et François JAULIN. Les facteurs Humains en Santé. Des clés pour améliorer la sécurité des patients…et la vôtre, édition Arnette. Octobre 2023.
> HAS. Le travail en équipe. Une des clés de la Sécurité du patient. Octobre 2021, 4 pages
> SFAR et Facteurs Humains en Santé. Facteurs humains en situations critiques. 2022, 81 pages.

Ces différentes dimensions s’inscrivent dans ce qu’on nomme généralement les compétences non techniques.
Ces compétences permettent aux professionnels de santé d’agir dans l’incertain, de développer des capacités à un niveau individuel (comme la connaissance de soi, la gestion des émotions), à la résolution de problèmes de manière collective, dans un environnement de travail propice. Ces recommandations apportent la notion de formation aux Facteurs Humains et notamment aux compétences non techniques. Dans d’autres univers (ferroviaire, aéronautique, etc.), des formations sont proposées et sont souvent obligatoires (par exemple dans l’aéronautique, un pilote au simulateur sera évalué sur 4 compétences techniques et 6 compétences non techniques).
L’objectif de cette action est de proposer un référentiel qui définira les compétences fondamentales en matière de sécurité du patient et d’organiser des formations aux compétences non techniques. Cette action sera utile aussi bien dans un programme de formation initiale que continue, que dans des procédures de recrutement de personnel et faciliteront la compréhension de l’analyse des causes systémiques des événements indésirables, ainsi que les actions d’amélioration.

Action 4 : Mettre en place une formation incitative des professionnels en charge de l’analyse des EIAS au sein des structures et établissements

Le rapport « Évaluation du programme national de sécurité des patients 2013-2017 », concernant la mise en œuvre et les effets observés, énonce : « que le programme national n’est pas parvenu à susciter une convergence et un renforcement synergique des diverses cultures de sécurité inhérentes à chaque profession, « cultures-métiers » qui restent fréquemment cloisonnées, telles qu’elles le sont dans les formations initiales, et encore peu familiarisées avec les démarches transversales de gestion des risques au cours du parcours de soin d’un patient. »
Les préconisations issues de ce rapport invitent à poursuivre la construction d’une culture commune de la sécurité des patients par une homogénéisation et « pluri professionnalisation » des formations.
Les Structures Régionales d’Appui à la Qualité des Soins et Sécurité des Patients (SRA QSS), membres des RREVA, disposent d’une mission d’expertise dans l’analyse des Événements Indésirables Associés aux Soins (EIAS).
Leurs actions de formation et d’accompagnement sont déclinées au service des établissements et en appui aux Autorités de Tarification et Contrôle.
Pour développer une culture régionale partagée, les SRA QSS déploieront des cycles de formations à destination de 2 cibles :
• Cycle de sensibilisation et d’entretien des compétences des professionnels en charge de l’analyse des EIAS au sein des structures, entretenu par la SRA régionale (mesures incitatives et action standardisée)
• Cycle de sensibilisation des professionnels en charge de la gestion des dossiers EIGS au sein des ATC sur les méthodes d’analyse de causes profondes des EIAS

Action 5 : Co-construire et co-animer avec des patients ressources ou représentant des usagers des formations à destination des professionnels de santé axées sur la qualité et la sécurité des soins.

Cette action propose d’initier la co-construction de programmes de formation sur les sujets de qualité et de sécurité des soins en associant des représentants d’usagers et des patients ressources. Une fois ces programmes construits, il est envisagé de développer des actions de formation destinées aux professionnels de santé ou médico-sociaux co-animés par des représentants de patients. Ces actions de formations seraient axées sur des thématiques liées à la qualité et à la sécurité des soins.

La littérature scientifique montre qu’il existe un lien fort entre la qualité du travail en équipe et la sécurité du patient. Les défauts d’organisation, de vérification, de coordination ou de communication au sein de l’équipe sont des causes majeures d’évènements indésirables associés aux soins.
Pour améliorer la sécurité des patients et des résidents, sous l’égide de la DGOS, la Haute Autorité de santé ainsi que l’Association Française des Directeurs de Soins coordonnent l’axe 1 « Valoriser et accompagner le travail en équipe et les temps collectifs sur l’ensemble du parcours patient ».
Pour atteindre cet objectif, cet axe se décline en plusieurs thèmes portant, entre autres, sur la poursuite du déploiement de Pacte (Programme d’amélioration continue du travail en équipe) en établissement de santé et PACTE en soins primaires, sur la valorisation du dispositif d’accréditation des médecins et des équipes, sur le déploiement des rencontres sécurité impliquant la gouvernance et sur l’association du patient en tant que membre de l’équipe.
Il s’agira également de communiquer auprès des professionnels et des usagers pour former et faciliter l’appropriation de ces différents sujets.

Action 1 : Poursuivre le déploiement de Pacte ou tout autre programme équivalent de la promotion du travail en équipe

L’organisation de la prise en charge des patients a considérablement évolué, tant par des durées de séjour raccourci et le développement de l’ambulatoire, la surspécialisation des professionnels, le prolongement de la vie avec une ou plusieurs comorbidités, les attentes des patients et de la société, etc. La coordination du parcours de santé, la gestion des interfaces, la communication entre l’ensemble des acteurs sont au cœur des enjeux et renforcent la place des facteurs humains et organisationnels pour une meilleure compréhension du fonctionnement d’une équipe, des compétences non techniques, des organisations du travail. La sécurisation des pratiques ne pourra être que collective et elle ne s’improvise pas. Quelle que soit la démarche (Pacte, TeamSTEPPS, les hôpitaux magnétiques, CRM etc.), il est prévu de faire connaître le travail en équipe, de mettre en place des retours d’expérience et de développer des scénarios de simulation sur le travail en équipe.

Action 2 : Faire vivre le PACTE en soins primaires

La nécessité de coordonner les soins de santé est un enjeu mondial en raison de la fragmentation accrue dans tous les systèmes de santé. Les parcours de santé des patients ne s’arrêtent pas aux établissements de soins. Au même titre que Pacte en établissement de santé, le programme PACTE en soins primaires a pour ambition de s’adapter aux modes de prise en charge en soins primaires, afin d’appuyer les professionnels de premier recours qui souhaitent renforcer les collaborations interprofessionnelles liées à un exercice coordonné. Cette formation aboutit à l’obtention d’un Diplôme d’Etablissement « Coordinateur de regroupements pluri professionnels de soins primaires ».
L’objectif de cette action est de renforcer la connaissance de ce dispositif de formation, de partager les expériences mises en place, les résultats et d’accentuer la culture du travailler ensemble, à travers des rencontres régionales (ou webinaires), et l’élaboration d’une charte.

Action 3 : Valoriser le dispositif d’accréditation en équipe
L’accréditation des médecins et équipes médicales est un programme volontaire d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins que met en œuvre la Haute Autorité de santé avec les organisations professionnelles. Il concerne essentiellement les spécialités à risque travaillant au bloc opératoire.
La HAS a comme objectif de renforcer la cohérence et les passerelles entre le dispositif d’accréditation et des dispositifs qui intègrent des volets sur la qualité et la sécurité des pratiques professionnelles, tels que la certification périodique des professionnels de santé, la certification des établissements de santé et le développement professionnel continu. Les équivalences ainsi mises en place permettraient de simplifier les obligations des professionnels de santé concernés et de les inciter à s’inscrire dans la démarche d’accréditation.
La HAS souhaite également augmenter le nombre de travaux issus de l’analyse des EIAS déclarés dans le cadre de l’accréditation des médecins et des équipes médicales et ainsi mieux valoriser les enseignements tirés du retour d’expérience des professionnels de terrain.

Action 4 : Inciter au déploiement des rencontres sécurité pour impliquer la gouvernance
L’implication de la gouvernance des établissements de santé ou médico-sociaux dans la sécurité des patients est indispensable pour engager l’ensemble des professionnels dans la démarche. La HAS propose aux établissements une méthode donnant l’opportunité au management de montrer à leurs équipes cette volonté : les rencontres sécurité.
Il s’agit d’une démarche complétant l’ensemble des méthodes et outils déjà mis à disposition des professionnels, notamment Pacte, et s’inscrivant également dans la certification des établissements de santé.
De nombreux outils sont mis à disposition pour réaliser cette démarche. Néanmoins, elle est encore peu utilisée alors qu’elle a fait ses preuves.
Cette action vise donc à sensibiliser et former les managers et directeurs d’établissements sanitaires et médico-sociaux aux rencontres sécurité, notamment dès leur formation initiale à l’EHESP. En parallèle, des travaux seront menés pour introduire des incitations à son utilisation par le biais, par exemple, de la contractualisation entre les Agences Régionales de Santé et les établissements.

Action 5 : Associer les patients en tant que membre de l’équipe
La qualité et la sécurité des soins est une préoccupation de santé publique partagée par tous les systèmes de santé. La reconnaissance de l’engagement du patient (personne concernée) et de ses proches est une des stratégies reconnues comme un des leviers permettant l’amélioration de la qualité et la sécurité des soins. C’est reconnaître l’expérience patient au même titre que celle des professionnels de santé. Cette reconnaissance joue alors un rôle essentiel dans la capacité d’une organisation à mieux répondre aux besoins et attentes des patients. Cet engagement revêt différentes formes, qu’il s’agisse du patient engagé lors des soins pour lui-même ou du patient en tant que pairs-aidants auprès d’autres patients, ou bien encore du patient associé à des projets de service avec des professionnels de santé.
L’action proposée ici vise, d’une part, à rendre plus explicite ces différentes situations et, d’autre part, à faire connaître des expériences de partenariat réussi sous un format pédagogique compréhensible pour les patients et les professionnels de santé.

Malgré la structuration d’un dispositif de déclaration des évènements indésirables graves associés à des soins (EIGS), notamment grâce au décret du 25 novembre 2016, les EIGS restent sous-déclarés. Par ailleurs, le système d’enregistrement des EIGS doit être amélioré pour permettre une meilleure exploitation de la base de données collectées. Par conséquent, l’amélioration de la déclaration des EIGS et en parallèle une meilleure structuration des formulaires de recueil et d’analyse des EIGS constituent un des axes principaux de la Feuille de route 2024-2025 « Améliorer la sécurité des patients et des résidents ».

Cet objectif est porté par trois actions :
  Encourager la démarche de déclaration, reprise dans un objectif transversal : Communiquer/faire connaître aux professionnels les acteurs et ressources sur qui s’appuyer en région pour les aider à déclarer et analyse les EIGS,
  Contribuer à la culture juste de la déclaration avec 2 piliers :
o 1/ Elaborer une information commune santé-justice sur la gestion des EIGS afin de construire un système apprenant basé sur la culture juste.
o 2/Rappeler aux professionnels de santé et aux directions d’établissement l’existence de charte de confiance et adapter les travaux sur la « just culture » conduits par le NHS.
  Adapter le dispositif de déclaration externe des EIGS et renforcer la gestion de ces derniers au niveau des agences régionales de santé.

Action 1 : Adapter le dispositif de déclaration externe des EIGS et renforcer leur gestion par les ARS
L’action 1 vise à renforcer le dispositif de déclaration externe des EIGS dans les trois secteurs de soins (établissements de santé, établissements et services médico-sociaux, ville), en renforçant l’accompagnement des déclarants et en apportant les évolutions qui peuvent s’avérer utiles au portail de signalement des évènements sanitaires indésirables, en tenant compte de leur faisabilité et de la feuille de route pluriannuelle de développement du portail.
L’action 1 vise également à renforcer la coordination au niveau national de la gestion des EIGS et à développer les échanges de pratiques et d’outils entre ARS et avec le niveau national. Elle vise, enfin, à renforcer l’appui des RRéVA.

Action 2 : Contribuer à la culture juste et non punitive
Il s’agit d’une action visant à implémenter la culture juste à la fois dans les tribunaux et auprès des professionnels de santé/établissements afin de favoriser la déclaration des EIGS dans l’objectif de diminuer les craintes des professionnels de santé et ainsi de lever un des freins à la déclaration des EIGS.

Action 3 : Encourager la démarche de déclaration
Il s’agit d’une action de communication auprès des professionnels du secteur sanitaire (ville et établissements de santé) et du secteur médico-social et auprès des étudiants en formation dans ces domaines.
L’objectif est, via les ARS, de leur faire connaitre les obligations et les modalités de déclaration des EIGS, mais aussi les acteurs et ressources existants sur lesquels les professionnels peuvent s’appuyer en région pour les

L’OMS lors de sa 72ème assemblée mondiale de la santé en 2019 a partagé ses considérations et préconisations en faveur de l’action mondiale pour la sécurité des patients repris dans son plan d’action mondiale pour la sécurité des patients en 2021. Le 3ème principe directeur de ce plan d’action est “Analyser et partager des données génératrices d’apprentissages”.
Le développement d’une culture de sécurité suppose une approche systémique et systématique en favorisant l’échange des meilleures pratiques et l’apprentissage, la confiance et la responsabilité mutuelle.
Les travaux menés dans le précédent Programme National de la Sécurité des Patients 2011-2017 ont permis de belles avancées en matière de structuration et d’accès au retour d’expérience sur les évènements indésirables associés aux soins (coordination de la gestion des risques en établissements de santé, financement de projet de recherche portant sur le retour d’expérience, mise en place du dispositif national sur les évènements indésirables graves associés aux soins, instauration d’une Structure Régionale d’Appui à la Qualité des Soins et la Sécurité des patients (SRA QSS) dans toutes les régions de France, publication de recommandations par la Haute Autorité de Santé et la FORAP, etc.). Ces différentes actions ont permis d’œuvrer vers des systèmes transparents de remontée des évènements indésirables associés aux soins. Le retour d’expérience doit permettre de tirer les leçons des évènements indésirables, de leurs conséquences, sans chercher des responsables tout en maintenant une approche de la sécurité des patients centrées sur les patients et les personnes accompagnées.
Depuis la publication du rapport “To err is Human” en 2000, l’intérêt a été croissant pour l’amélioration de la sécurité des patients malgré un contexte contraint des soins délivrés aux patients. De nombreux articles scientifiques soulignent le rôle majeur que peuvent avoir la notification des évènements indésirables associés aux soins et l’intégration des facteurs humains et organisationnels dans une approche d’analyse systémique pour identifier les causes et les facteurs contributifs de survenue afin de mettre en place des plans d’actions locaux, régionaux et nationaux en matière de qualité des soins et de sécurité des patients. (Safety I). Pour autant, dans le contexte de développement du système de santé, les défis de complexité et de résilience des professionnels de santé doivent amener à comprendre et faire connaître ces ajustements et partager les réussites de délivrance des soins en matière de qualité des soins et de sécurité des patients dans les situations complexes de prises en charge et d’accompagnement (Safety II).
La diffusion élargie du retour d’expériences à tous les niveaux est donc primordiale pour permettre d’apprendre des erreurs et des dysfonctionnements mais aussi des actions quotidiennes assurant la sécurité des patients. Un système d’apprentissage permettant de partager les enseignements issus des difficultés mais aussi des réussites.
L’axe 3 de cette feuille de route Culture de Sécurité s’attache donc à favoriser la mise en œuvre du retour d’expériences à tous les niveaux et ce, dans l’esprit d’une démarche de meilleure connaissance des apprentissages des échecs et des réussites des équipes :
• Proposer une approche fondée sur une analyse objective, une culture juste et positive de l’EI (apprendre de ses erreurs)
• Echanger et diffuser les meilleures pratiques et encourager l’apprentissage mutuel,
• Promouvoir et développer une culture de la sécurité en favorisant les dispositifs de retour d’expérience quelque-soit le lieu d’exercice des professionnels
• Accompagner le développement des compétences d’appui aux niveaux national, régional et local

Action 1 : Organiser des réunions de partage d’expérience au niveau national
Le partage d’expérience est fondamental pour l’amélioration des pratiques professionnelles et contribue au développement de la culture de sécurité des soins. Il doit permettre :
  d’améliorer la qualité des analyses d’EIAS
  de développer la culture sécurité des professionnels du soin et de l’accompagnement
  de déployer une approche fondée sur une analyse objective, une culture juste et positive de l’EI (apprendre de ses erreurs)
Les deux premières actions de cette feuille de route s’inscrivent dans cette logique : partager les expériences à tous les niveaux et apporter appui et expertise aux acteurs. La mise en place d’espaces collectifs de partage d’expériences au niveau national contribuera à un meilleur accès et connaissance des retours d’expérience et de leur principe de mise en œuvre sur l’ensemble du territoire

Action 2 : Organiser un partage et une mutualisation des retours d’expérience au niveau régional
Le partage d’expérience est fondamental pour l’amélioration des pratiques professionnelles et contribue au développement de la culture de sécurité des soins. Il doit permettre :
  d’améliorer la qualité des analyses d’EIAS
  de développer la culture sécurité des professionnels du soin et de l’accompagnement
  de déployer une approche fondée sur une analyse objective, une culture juste et positive de l’EI (apprendre de ses erreurs)
Les deux premières actions de cette feuille de route s’inscrivent dans cette logique : partager les expériences à tous les niveaux et apporter appui et expertise aux acteurs. La mobilisation du RREVA pour rendre visible et lisible les partages d’expériences est un levier pour favoriser l’accès aux retours d’expériences et à l’expertise de la Structure Régionale d’Appui à la Qualité des Soins et la Sécurité des Patients. Ces retours d’expériences doivent être deux ordres : capitaliser sur les évènements indésirables associés aux soins et sur les réussite pour valoriser les barrières de sécurité mobilisées par les équipes.

Action 3 : Inciter à la mise en œuvre de RMM ville-hôpital
Le déploiement du retour d’expérience doit pouvoir s’appuyer sur les expériences de l’ensemble du parcours du patient et des personnes accompagnées et y associer les professionnels de ville, des établissements de santé et du champ médico-social. Il s’agit d’un enjeu majeur pour le déploiement d’une culture de sécurité partagée.
Ces dernières années, les professionnels des soins primaires se sont appropriés progressivement plusieurs démarches d’amélioration de la sécurité des soins comme celles d’analyse des causes des événements indésirables (Comité de Retour d’Expérience ou RMM) et l’utilisation de la simulation.
Le développement des méthodes et outils spécifiques au contexte des soins primaires est essentiel pour favoriser leur mobilisation. Les CPTS sont un espace de coopération afin d’améliorer la coordination des soins entre les différents professionnels de santé. Le retour d’expérience est un levier essentiel pour y contribuer.
L’action d’appui et d’accompagnement auprès des professionnels de ville vise à identifier les initiatives et réussites, les besoins en ressources et compétences pour favoriser la mise en œuvre et la connaissance des retours d’expériences sur les évènements indésirables associés aux soins.

Action 4 : Clarifier le positionnement et les compétences attendues en matière de CGRAS
La mise en œuvre de la fonction de coordonnateur de gestion des risques associés aux soins (CGRAS) a été instituée par le décret du 12 novembre 2010. Les enjeux en matière de développement de la culture de sécurité et de mobilisation des compétences propres en matière de qualité des soins et sécurité des patients en établissement de santé nécessitent de questionner la place qu’occupe le coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins afin de tirer les enseignements de ses plus de 10 années de déploiement pour parfaire son plein rôle dans la coordination de la gestion des risques associés aux soins.
Le déploiement du retour d’expérience en établissement de santé nécessite de pouvoir s’appuyer sur une coordination de la gestion des risques déployés auprès de l’ensemble des parties prenantes : management et professionnels de santé.
Le déploiement d’une enquête état des lieux de la fonction de coordinateur de la gestion des risques associés aux soins en établissement de santé permettra de tirer les enseignements du déploiement de cette fonction depuis plus de 10 ans et de préconiser les évolutions nécessaires afin d’œuvrer pleinement en faveur du déploiement des attributs de la culture de sécurité.

Les études scientifiques et rapports montrent que les évènements indésirables graves associés aux soins (EIGAS) évitables sont plus nombreux dans certains secteurs et étapes de la prise en charge des patients. L’identification de ces secteurs et une analyse approfondie des circonstances entourant ces évènements sont d’une importance majeure pour améliorer la sécurité des patients. Des actions spécifiques sur ces secteurs peuvent être menées afin de réduire la survenue et la gravité de ces évènements indésirables.
Cette approche ciblée sur différents secteurs vise à améliorer de manière significative la sécurité des patients en identifiant les points sensibles des prises en charge, afin de repérer et d’agir sur les situations à risques.
L’axe 4 de la feuille de route « Poursuivre des actions ciblées dans certains secteurs » se décline ainsi sur le bloc opératoire, dans le secteur des soins critiques, sur la transition hôpital-domicile des patients et la prévention du risque suicidaire.

Action 1 : Au bloc opératoire, promouvoir une meilleure utilisation de la check list afin de diminuer les EIAS
Des événements indésirables se produisent régulièrement au bloc opératoire. Ils ne sont pas inéluctables, il existe des barrières efficaces pour les éviter, comme la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire ». Elle facilite le partage d’information en équipe à un moindre coût cognitif, en déchargeant mentalement les professionnels de tâches répétitives lors de séquences de soins prévisibles. Elle a scientifiquement fait la preuve de son efficacité. Toutefois, bien qu’obligatoire depuis 2010, la check-list n’est pas toujours utilisée de façon optimale par les professionnels. Son caractère générique et sa présentation administrative peuvent conduire à la renseigner de manière mécanique et vidée de son sens. La HAS souhaite améliorer l’appropriation et l’utilisation de la check-list, avec une nouvelle politique qui peut se résumer à « adapter la check-list pour mieux l’adopter ». Elle propose désormais aux équipes de choisir une check-list adaptée à leurs besoins et spécificités.
Il s’agit à présent de s’assurer que cette nouvelle politique est connue et appréciée, de savoir si les équipes de bloc opératoire se l’approprient et si la check-list est mieux utilisée in fine.

Action 2 : En soins critiques, repérer les leviers d’action
L’objectif de cette action est d’identifier des leviers d’action permettant de sécuriser les pratiques et les organisations en secteur de soins critiques en lien avec les professionnels et les sociétés savantes. Premièrement, l’exploitation de la base nationale des EIGS reçus par la HAS permettra d’identifier certaines pistes d’amélioration. Deuxièmement, une expérimentation d’un recueil des admissions et des refus d’admission en soins porté par les CNP est envisagée afin de partager les pratiques. Enfin, la création d’un organisme agréé pour la réanimation médicale en vue de l’accréditation des médecins et des équipes concernées est en cours d’étude.

Action 3 : Améliorer la sortie des patients et notamment la transition hôpital-domicile
La préparation et l’organisation de la sortie d’hospitalisation sont une étape essentielle permettant de garantir la continuité et la sécurité des soins. Une préparation insuffisante de la sortie peut induire, de manière directe ou indirecte, une augmentation des réhospitalisations précoces. L’action 3 vise à améliorer les conditions de sortie des patients, en mettant l’accent sur la transition hôpital-domicile. Plusieurs approches sont proposées telles que le rappel des bonnes pratiques de planification de la sortie en établissement, la prise en compte des conditions de vie du patient en amont de sa sortie, l’amélioration de la coordination entre les différents acteurs notamment grâce aux informations transmises via la lettre de liaison à la sortie.

Action 4 : Améliorer la prévention du risque suicidaire
L’action 4 vise à améliorer la prévention du risque suicidaire en passant par différents leviers d’action.
Premièrement, cette action propose la diffusion d’une grille d’évaluation qui permettra aux établissements de santé et médico-sociaux de mettre en place un plan de sécurisation.
Deuxièmement, cette action permettra la mise en place d’accompagnements et d’outils visant à repérer les patients à risque pour mieux les orienter, les suivre et les prendre en charge le cas échéant.
Troisièmement, cette action s’appuiera sur la diffusion des outils et dispositifs proposés dans le cadre de la stratégie nationale de prévention du risque suicidaire. (3114 ; VigilanS…)
Enfin, l’action met en avant l’importance de la déclaration et de l’analyse des incidents liés à des gestes suicidaires afin d’encourager une communication non culpabilisante et constructive intra-équipe et anticiper ou prévenir les risques de récidive en cas de tentative de suicide.

La sécurité des soins est une exigence éthique pour les professionnels et une attente légitime pour les patients. La sécurité des soins signifie que tout est fait pour prévenir les événements évitables, réduire les risques d’erreurs et détecter précocement toute forme de préjudice associé aux soins pour en réduire l’impact. La légitimité du rôle que peuvent jouer les patients et leurs accompagnants pour rendre leurs soins plus sûrs doit être reconnue par l’équipe soignante et leur participation active doit faire partie intégrante de l’organisation de la prise en charge et de l’évaluation de ses résultats.
« La participation active des patients et leur autonomisation sont au cœur du Plan d’action OMS pour la sécurité des patients 2021-2030".
La plupart des préjudices causés aux patients sont reconnus comme évitables, et la collaboration des patients, des familles et des aidants est l’une des principales stratégies pour réduire ces préjudices (OMS. Journée mondiale sécurité des patients 2023).
Reconnaître aux patients le pouvoir d’agir exige des professionnels une écoute attentive et respectueuse de leur autonomie et de leurs décisions ainsi qu’une aide patiente à leur prise de parole pour recueillir les informations sur leur parcours et identifier leurs vulnérabilités La prise en compte de leur expérience dans l’évaluation des résultats permet de les faire participer à l’information sur la pertinence, la qualité et la sécurité des soins qui sera proposée aux futurs patients. Une information sincère et authentique sur la pathologie, les examens et le traitement qu’elle peut justifier sont un premier pas vers la participation effective de la personne à la décision partagée et à la qualité de ses soins.
Quelle qu’en soit la cause, les erreurs de soins existent. Leur signalement permet l’analyse et la production de recommandation pour éviter la récidive. Le récit que peut faire le patient (ou ses proches) de l’événement qu’il a subi doit être recueilli car il apporte un autre regard à une analyse qui actuellement repose uniquement sur un récit médical et soignant.

Action 1 : Renforcer le pouvoir d’agir du patient en partenariat avec les professionnels de santé
L’objectif de cette action est de développer des outils et des initiatives visant à promouvoir la sécurité des patients et à favoriser leur participation active dans leur parcours de soins. Les sous-actions prévues comprennent le développement de Mon espace santé et d’une application liée pour permettre aux patients de signaler les événements indésirables, la promotion du projet de soin personnalisé, la promotion de la démarche de décision partagée et l’encouragement des patients à poser des questions et à échanger avec les professionnels de santé.

Action 2 : Faciliter le recueil de l’expression du patient et la prendre en compte
L’objectif de cette action est de promouvoir l’expression et la communication avec le patient et leur prise en compte par les professionnels de santé. Le patient est la personne la mieux placée pour connaitre l’intégralité de son parcours, les passages ville hôpital comme les prises en charge inter-établissements ou inter professionnels en soins de ville. Cette action a pour objectif de favoriser la mise en place d’outils de recueil du point de vue du patient par filière et aussi par type d’épisode de soins tels que des dispositifs d’évaluation comme les PROMs et les PREMs qui sont des indicateurs de mesure de la qualité des soins perçue par les patients.
Les Patient-Reported Outcome Measures (PROMs) mesurent le résultat des soins, les Patient-Reported Expérience Measures (PREMs) mesurent l’expérience des soins et la qualité de vie suite aux soins, traitements ou interventions.
Enfin, cette action vise également à sensibiliser les professionnels à favoriser la communication et l’écoute active avec les patients.

Action 3 : Associer les patients et les représentants des usagers dans l’analyse des EIAS
Les patients ont toute leur place dans la déclaration et la gestion des évènements indésirables associés aux soins (EIAS). Cette action vise d’une part, à promouvoir leur rôle, dans le signalement de ces évènements en facilitant l’accès au portail national de signalement pour l’ensemble des usagers de la santé et en incitant les patients à participer au signalement des erreurs du système qu’ils ont pu constater lors de leur prise en charge. D’autre part, cette action a pour objectif d’intégrer le récit du patient dans l’analyse d’un EIAS contribuant ainsi à mieux comprendre ce qui a pu conduire à une erreur, à améliorer les pratiques professionnels ou à corriger les défaillances du parcours, des organisations ou du système de santé.


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